Paris, Maspéro, Coll. Cahiers libres, 1964. 205 pages
Le grand dessein africain de la Cinquième République, à
mi-chemin des chimères chiffrées des technocrates et des songeries
orgueilleuses du Général, ne réussit donc en Guinée
qu'à alimenter la propagande des extrémistes.
La fraction de l'opinion publique que représentaient les jeunes et
les intellectuels, se déclarait en effet décidée à
opter délibérément pour l'indépendance. Assimilant
colonialisme et capitalisme, intérêts des élus qui
peu à peu s'intègrent dans la bourgeoisie, et communauté,
intellectuels et masse révolutionnaire, les Etudiants et Elèves
de Guinée appelaient tout à la fois à l'indépendance
nationale et à la révolution sociale.
Lors de leur IVè Congrès qu'ils tinrent à Conakry du
20 au 24 juillet 1958, dans la salle du cinéma Vox, décorée
pour l'occasion de trois banderoles en calicot résumant leur programme
1, ils exposèrent en termes souvent très
vifs et qui entrainaient l'enthousiasme d'un auditoire de quelques milliers
de personnes, leur hostilité à toute solution autre que la
libération. L'intervention du Président des Etudiants d'Afrique
Noire en France et Président du Congrès, Ly Thidiané
Baidi, donne le ton. Sa péroraison en témoigne:
Considérant que l'avènement de de Gaulle au pouvoir a été imposé par les réactionnaires, considérant qu'il est l'émanation d'un pouvoir fort et qu'il cherche la restauration de l'empire, considérant qu'avec son gouvernement s'intensifie la guerre en Algérie, le Congrès dénonce toute manoeuvre subversive et décide de mettre sur pieds un comité de défense des libertés démocratiques et se déclare contre le référendum et la réforme de la constitution.
Dans les jours qui suivirent ce congrès, les étudiants tinrent des conférences publiques pour défendre l'lndépendance. C'est ainsi que le 31 juillet 1958, à la Maison des Jeunes et de la Culture de Conakry, le Président des Etudiants reprenait les mêmes thèmes devant plusieurs centaines de personnes, traitant de l'Afrique Noire face à l'impérialisme, et du gouvernement de Gaulle face à l'indépendance :
Nous constatons que le gouvernement de de Gaulle est formé par des hommes qu'il a choisis lui-même et qui possèdent des actions dans diverses sociétes et industries tant en France qu'en A.O.F. Pensez-vous que ces hommes-là feront quelque chose contre les impérialistes dont ils font partie ? Pensez-vous qu'ils vont porter atteinte à leurs propres intéréts ; certes il y a des Africains dans ce gouvernement... et si Senghor a refusé d'y participer, c'est parce que son parti lui a imposé son veto, prévoyant une existence précaire à ce gouvernement. Commenf voulez-vous que les trusts qui profitent honteusement de nous, puissent faire quelque chose pour notre bien-être.
Au même moment, les leaders guinéens du P.R.A., dépourvus
depuis la révolte de mai 1958 de tout tremplin électoral,
s'étaient lancés dans la campagne en faveur du "Non",
position uniquement démagogique qui, visait à se faire passer
pour au moins aussi progressistes que le P.D.G.
Dans ce pays par conséquent où pas une seule voix africaine
ayant quelque audience ne défendait la Communauté, où
par contre existait un fort courant d'opinion en faveur de l'Indépendance,
le chantage ne pouvait pas jouer.
1. 35 morts, 150
blessés. Honte aux criminels qui continuent de troquer le sang du
peuple africain contre des joujoux et des sucettes (Voir Nature
et hétérogénéité de la classe dirigeante
guinéenne).
2. Pour l'unité des Jeunes Travailleurs et des Etudiants.
Contre leur Communauté Franco Africaine.
Pour une Communauté Africaine.
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