Académie des Sciences d'Outre-Mer. Paris. 1984. 380 p.
Une femme avait un fils qui, devenu grand, restait célibataire. Une année il fit son champ près de la route qui menait à un grand marché. Chaque jour de marché deux belles filles passaient près de lui à l'aller et au retour. Leurs seins étaient si fermes que n'importe quel homme les eût suivies. Un soir il demanda à l'une de devenir son amante. Elle répondit qu'il fallait les prendre toutes les deux ou aucune. En gage d'amitié, il va chercher deux maniocs qu'il leur donne, mais pour cette fois-là elles refusent de passer la nuit avec lui dans son champ. Il les accompagne alors un bout de chemin puis s'en retourne songeur. En effet, près du lieu où il les a quittées, il a aperçu deux peaux de biche fraîches.
La semaine d'après, quand il les voit passer pour se rendre au marché, il les interpelle et leur renouvelle sa demande.
— Nous verrons ce soir, répondent-elles.
A peine ont-elles dépassé le champ que l'homme suit en sens inverse le chemin qu'elles viennent de parcourir. Près du premier marigot il découvre deux peaux de biche toutes fraîches. Il s'en empare et les ramène à sa case où il les attache au plafond de son grenier près de sa provision de sel. Puis il prévient sa mère qu'il va tenter de faire coucher là les deux jeunes filles cette nuit.
— Prépare le repas, ajoute-t-il.
Alors que le soleil commençait à baisser à l'horizon, les filles revenant du marché vont saluer le jeune homme.
— Passez la nuit ici, leur demande-t-il.
— Non, la prochaine fois, répondent-elles.
A regret il les laisse partir et continue à faire son champ. Ces jeunes filles n'étaient en réalité que des biches qui prenaient chaque semaine forme humaine. Arrivées au marigot, elles cherchent leurs peaux qu'elles avaient laissées le matin même, mais en vain. Elles retournent alors chez leur ami et prétextant que la nuit est trop noire pour rentrer chez elles, lui demandent l'hospitalité. Le jeune homme avertit sa mère qui tue deux poulets pour le repas du soir.
La nuit venue, il se couche avec les jeunes filles et les déflore toutes les deux.
Ayant perdu leurs peaux, elles ne pouvaient plus se transformer en biches, aussi se laissaient-elles aller à songer au mariage. Avant même le mois de la récolte les deux femmes furent enceintes.
Un jour, le mari ayant convié ses amis à un repas, il envoie l'une de ses femmes chercher le sel. Celle-ci monte dans le grenier et aperçoit les deux peaux qui, avec le temps avaient séché, Elle n'en dit rien à personne, sauf à sa camarade et lorsqu'elles vont puiser de l'eau elles emportent les peaux dissimulées dans un canari. Elles les cachent dans un trou du marigot où peu à peu elles retrouvent leur souplesse première ; quand les peaux sont parfaitement souples, elles profitent d'une vaisselle à faire pour se rendre au marigot où elles reprennent leur forme de biches. Mais ce sont maintenant deux biches pleines qui passent devant la case de vieille femme laquelle sort et essaie de les poursuivre, mais elles fuient et elles vont jusqu'au champ du jeune homme qui tente de les retenir, mais en vain. Il pleure tandis que les biches s'enfoncent dans la forêt.
Quelques temps après les deux biches mirent bas chacune un chimpanzé. Voilà comment les Kono expliquent la ressemblance entre l'homme et le chimpanzé.
[ Home | Etat | Pays | Société | Bibliothèque | IGRD | Search | BlogGuinée ]
Contact :info@webguine.site
webGuinée, Camp Boiro Memorial, webAfriqa © 1997-2013 Afriq Access & Tierno S. Bah. All rights reserved.
Fulbright Scholar. Rockefeller Foundation Fellow. Internet Society Pioneer. Smithsonian Research Associate.