« Les civilisations ne se sont pas assagies du tout quand elles ont su qu'elles étaient mortelles. Qu'adviendrait-il d'elles si certains d'entre les humains, leurs bâtisseurs, étaient un tant soit peu assurés de leur éternité ? »
« Combler le déficit de la pensée dans tous les domaines, cause première de maints blocages structurels de l'Afrique, dépoussiérer ensuite sa parole porteuse est une entreprise dont il ne faudrait plus faire l'économie pour espérer dévoiler ce dont est réellement pétrie l'âme africaine, très éloignée du folklore dans lequel on l'a confinée par simple paresse intellectuelle. »
Extrait de Pourquoi, diable, n'ai-je pas été un griot ?
(Ou la « palette » d'écriture d'un certain Cheick Oumar Kanté,
« écrit-vain » mandingo-peul, guinéo-malien,
ivoiro-centrafricain, franco-européen, afro-humain.)
Sur l'outil de travail, il a écrit :
Peine
Face à la haine !
Rôde l'angoisse,
S'incruste la poisse,
Moments d'incertitude,
Menacent les affres de la Solitude.
Du papier blanc sous les yeux de mon vague à l'âme.
Entre les doigts, de mon marabout, le célèbre calame.
Trempé dans l'encre, il calligraphie
Et remplit, dans une géographie
D'équilibre, maints espaces sûrs.
Telle bonne sourate me rassure,
Une autre chasse ma peur
[Et] fouette mon ardeur (…)
Doŋora de mon enfance !
[Nombreuses] sont les merveilles,
Chez moi, impossibles à retrouver,
Après ma trop longue absence.
Parmi les défuntes, ma belle Doŋora,
La rivière du quartier de ma naissance
Où l'on porterait au réveil,
A toujours très bonne raison,
De la chaude laine angora
En une certaine froide saison !(…)
Extraits de Pourquoi, diable, n'ai-je pas été un… poète ?
Chérir son pays…
(…) Aimer son pays,
Ce n'est pas mentir sur lui.
Ce n'est pas éclairer par ses hallucinations des nuits sans lune.
Ce n'est pas bâtir
Dans les déserts de ses fantasmes des mirages fabuleux.
Chérir son pays,
C'est en vivre partout les misères.
C'est exhaler fort ses odeurs de putréfaction.
C'est porter haut l'étendard de toutes ses blessures…
Entendez les coups de canon sur la Côte de Kaloum !
Sifflent les balles, souffrent les blessés.
Fauchent les sabres, rougissent les sables.
Les têtes tombent. Les tombes s'ouvrent et se referment.
Il retombe des corps sur les pierres tombales(…)
Extraits de Après les nuits, les années blanches.
« Nombre de Guinéens en exil ont beaucoup souffert de ne plus disposer d'une seule rengaine du pays à fredonner sans se faire mal, toutes les chansons populaires traditionnelles, tous les refrains du patrimoine commun ayant été vidés de leur contenu originel pour être truffés de slogans mobilisateurs et guerriers prétendument révolutionnaires ! »
Extrait de “Par temps de blues” du recueil de nouvelles, Le bogue réparateur
“Pour que des fumées blanches s'échappent, dans les temps, de la Grande Cheminée guinéenne et soient suivies par d'autres fumées blanches, il va falloir renoncer d'emblée à appliquer des cautères sur les jambes de bois et recourir à la chirurgie fine de la plus haute performance. Deux ou trois défis cruciaux (l'électricité et l'eau potable pour tous, la sécurité des biens et des personnes…) sont à relever en un temps record et surviendra à temps, on ne peut plus opportun, le « big-bang » salutaire… Tout le reste ne serait que perte de… temps, un temps qui, on l'aura compris, sera pour les Guinéens et leurs dirigeants le facteur déterminant.”
Extrait de “Guinée : En attendant le « big-bang » !”, article paru sur Africultures le 13 juin 2007 et, depuis, aux Forums d'une vingtaine de sites guinéens, africains, français, belges…
A tous les sacrifiés du « Miracle ivoirien » !
Incroyable mais vrai, ils l'auront donc faite,
La maudite guerre au pays d'Houphouët !
Je suis de ceux qui auraient très cher parié
Qu'ils n'y auraient jamais eu recours aux bords de [l'Ébrié] !
(…) A semblé malheureusement s'être enclenché
Le processus immérité de régression de la Côte d'Ivoire…
« La paix n'est pas un mot.
C'est un comportement », disait Houphouët.
(…) Moins d'une décennie après sa mort,
Son credo aura bel et bien cristallisé
Toute la fureur de ses compatriotes !
Le désir d'ivoirité aura-t-il gommé du coeur des Ivoiriens
Le sens de l'hospitalité, de la fraternité,
De l'africanité, de la simple humanité,
Inscrit en lettres d'or et d'ivoire dans « L'Abidjanaise » ?
Les Ivoiriens auront-ils voulu à titre posthume
Avoir eux-mêmes tué leur « Vieux » ?
(…) Je ne doute pas, de toute façon,
Qu'au plus fort de la barbarie,
Des Kragbé auront sauvé des Fofana,
Des Amoakon auront protégé des Coulibaly,
Des Konan auront caché des Fadika,
Des Dago auront secouru des Touré(…)
[Car] inspiré par l'un des plus grands poètes français
De la fin du siècle d'avant le dernier siècle,
Parlant de sa France et de l'Europe,
J'ai longtemps rêvé, moi aussi,
D'une Afrique qui serait l'ancienne Côte d'Ivoire élargie ! …
Extrait d'une prose publiée sur Africultures le 24 octobre 2002
A ce si cher Centre de l'Afrique !
La place pour le prendre
Ce pouls de l'Afrique bénie
Mais mal dirigée
Ou en dépit du Bon sens, il n'y a de meilleure
Que celle de Bangui !
(…)
On s'y rend exprès, de toute façon, on n'y fait pas escale.
Et, tous ceux qui y séjournent, un jour,
Du succulent capitaine d'eau douce se régalent
Et réalisent qu'on n'y est pas anthropophage pour toujours.
(…) Ce si cher Centre de l'Afrique,
Le point de fusion des innombrables richesses
Du berceau de l'Humanité,
Demeure si pauvre, matériellement parlant !
(…)
Pour Bangui, bien que Guinéen je sois,
J'ai désormais une véritable empathie,
Aux tracas des Banguissois, je compatis.
Et, de mon Fouta-Djallon natal, tout là-haut,
A tous les Centrafricains, je crie (…): « Balao ! »
Je leur déclare même: «Je suis un Banguissois. »
Extrait d'une prose publiée sur Africultures le 30 octobre 2002
Cette France, si adorable (…) !
En douce France,(…)
Plus assez d'espace
[Pour] toutes les pensées
Du[ trop] vaste monde !
Très chères, elles sont
Prises les bonnes places !
(…)
Tout penseur pensant bien y penser,
Comme à un bout de gras par temps de pénurie,
S'accroche à son filon de pensée de peur que, hormis lui,
D'autres aient pensé avec une égale fierté,
La même chose, dans les mêmes termes, au même moment
Ou, pire, très peu de temps avant.
Vouloir le lui disputer est un crime de lèse-majesté ! (…)
Tous les maîtres à penser, devenus d'impitoyables oracles,
(…) N'entendent désormais que le souffle de leur for intérieur.
Péripatéticiens du village global,
De plateaux de radio en « tréteaux » de télé, ils errent,
Proférant en des « One-Penseur-Show ! » bien huilés
Anathèmes, diatribes, humeurs et imprécations.
Extrait d'une prose publiée sur Africultures (« Vous avez la parole ») le 4 juillet 2003 avec le titre : « Penser aujourd'hui en France ! »
“Féminine, la Voix de la France aiderait le monde entier — on est en droit de l'espérer — à se frayer d'autres chemins que ceux des maquis somaliens, afghans, irakiens… que certains présidents hégémonistes, modèles de quelques-uns des aspirants français à l'investiture suprême, ont encouragé à prendre de façon si tragique.”
Extrait de « Vivement une présidente ! » article paru entre autres sur webzinemaker.com/Désir d'avenir 77/ « Autour de Ségolène » le 8 octobre 2006
“Il est révoltant que « des journalistes d'une certaine nomenklatura », nullement inquiétés par les « OPA » invasives sur les médias, soient devenus des plumes et des micros armés pour des Instituts de sondages et se contentent de seriner avec un étonnant don d'ubiquité des boniments réduisant le choix des électeurs entre deux prétendants, longtemps avant l'enregistrement de toutes les candidatures ”
Extrait de « France : Portrait du président ! » texte paru entre autres sites sur Afrology.com/ « Presse récente » en septembre 2006
“La France n'est pas seule ni ne s'est constituée après la dernière pluie. Elle a un passé de lumières et d'ombres et ne peut espérer un futur radieux avec ceux qui justifient, au présent, tous ses errements et tirent fierté de l'ensemble de son histoire à commencer par les crimes qui l'ont jalonnée. Elle est en Europe, la France et dans le monde. Alors, il n'est pas indifférent que préside à ses destinées non pas une forte tête mais une personnalité forte qui, dans la conjoncture actuelle, me paraît être éminemment, évidemment, une Femme. Tant elle me semble être la plus encline à réveiller le désir de mieux vivre ensemble : d'abord entre Français, ensuite entre Français et Européens et enfin entre Européens et Africains, Américains, Arabes, Asiatiques…»
Extrait de « Du discours à la méthode : Les enjeux du second tour présidentiel français », article paru aux Forums de Marianne-en-ligne.fr le 25 avril 2007, de Libération le 26, de Afrikara le 27 et sur webzinemaker.com/Désir d'avenir 77/ « Autour de Ségolène » le 27
“Confier (…) le destin de tous les Français à des hommes politiques qui, sous le prétexte d'améliorer les méthodes de gouvernement, ont pour tous bagages philosophiques, idéologiques, économiques, moraux… les obsessions des citoyens les plus repliés sur eux-mêmes, volontairement sourds, muets et aveugles devant les soubresauts du monde et les menaces de tous ordres qui pèsent sur la planète ? C'est, purement et simplement, organiser le vrai déclin de leur pays!
Faire confiance, pour tout dire, aux receleurs des poubelles de l'histoire à la seule fin d'accommoder mieux un présent chaotique, c'est désespérer des citoyens français — de plus ou moins fraîche date — qui, pour avoir « planqué » en France leurs fortunes : liberté, force de travail, capacité de création et amour, parfois, n'iront sûrement plus chercher asile ailleurs à la survenue d'un danger gravissime pour « la patrie » mais verseront au contraire leur sang sur place pour la défendre.”
Extrait de « France : Portrait du président ! » texte paru entre autres sites sur Continent Premier Magazine le 26 octobre 2006
As-tu vu… ?
As-tu vu, Prédateur en chef,
L'état dans lequel t'as mis le monde ?
Dis, est-ce que t'as vu
Dans quel état tu vas laisser le monde ?
T'as pas vu ?
[Si !] …
(…)
Admire donc tes Oeuvres comme tu les trouves (…) merveilleuses:
Les grands bûchers de vaches folles et de poulets à la dioxine,
Les encensoirs géants crachant volutes de chanvre et de dioxyde,
Les retraites aux flambeaux avec pour torches des buildings,
Les hommes, les femmes, les enfants et les vieillards kamikazes,
Les voitures, les avions, les bateaux et les trains torpilles,
Le Sida Triomphant, le Palu Résistant, le Cancer Mutant ! …
Bientôt, animaux, insectes, eaux et végétaux piégés ?Sous ta bannière verdâtre, cousue de colombes naguère blanches,
De croix bizarres, de croissants rouge-vif, d'étoiles qui flanchent,
D'anneaux olympiques ternis et de rameaux desséchés d'oliviers,
Coexistent Le Bec du Perroquet en Guinée, Sangatte en France,
Guantanamo à Cuba et autres divers No Man's Land
En Australie, en Somalie, en Éthiopie et ailleurs,
Pathétiques colonnes humaines en totale déshérence !
Soucieuses de bonheur pour elles-mêmes et pour les leurs,
A pied, certaines ont défié forêts d'Amazonie et savanes du Sahel,
Plateaux, montagnes, déserts du Sud et glaciers du Groenland(…)[Elles] préfèrent de loin squats et camps de rétention,
Innombrables centres de transit dans les autres nations,
Désespérées de ne pas trouver leurs propres places
Dans un monde qui sourit aux seuls coeurs de glace !(…)
Extrait d'une prose publiée sur Africultures.com le 11 décembre 2002
« Le problème n'est pas tant que l'Histoire ait été tout ce qu'elle a été mais bien que le présent soit ce qu'il est et augure si mal de ce que sera le futur ! »
Extrait de « Anachronismes !… Vous avez dit : anachronismes ? »Article paru sur Africultures.com le 23 décembre 2005, une contribution au débat sur le prétendu rôle positif de la colonisation française.
Rendre compte de ta beauté !
Si j'avais pu faire ton portrait…
Je l'aurais si bien réussi que le premier lecteur
Te m'aurait [volée] de son regard envieux.
(…)
Si j'avais pu te mouler…
Mes doigts ruisselant d'affection
Auraient sillonné (…) chaque repli de ton corps,
Pétri ton coeur et ton âme
Et, par mille et un attouchements enflammés,
T'auraient fixée pour l'éternité (…)Si j'avais pu te sculpter…
Je t'aurais faite en or pas en bois En massif pas en relief (…)
Et les nattes sur ta tête auraient brillé
Pour ternir l'éclat de toutes les beautés imaginables (…)[Mais], ton beau profil arc-en-ciel
Aurait été aspiré par Dieu concupiscent et jaloux.Hélas ! Je désespère
De jamais réussir à rendre compte de ta beauté (…)
Sais-tu pourquoi ?
Parce que tu es une Mandingue.
Le sais-tu ?
Oui, tu le sais
Et tu en profites !
Extrait de Après les nuits, les années blanches
Guerres, sang, viols, désolations à la une et à n'en plus finir !
« (…) Très peu pour moi, le sang et le sensationnel vingt-quatre heures sur vingt-quatre ! Jamais, je n'ai eu envie de devenir un correspondant de guerre, moi ! (…) Il m'est insupportable d'avoir sans arrêt à procéder aux incontournables décomptes macabres. En pratiquant l'affreuse arithmétique des pertes en vies humaines pour laisser les camps en conflit croire qu'ils auraient perdu plus ou moins de soldats les uns que les autres, j'aurais eu l'impression d'activer à leur place la redoutable machine de mise à mort réciproque. (…) Les comptes rendus réguliers d'un journaliste de guerre — ayant même la possibilité d'être au plus près de la réalité — finissent toujours par encourager les ripostes, les représailles et donc un embrasement progressif et général des foyers de tension.
(…) Je préférerais (…), en vivant ou après avoir vécu avec les uns et les autres — ici, là et ailleurs — être à même de leur dire tout ce qui pourrait déclencher à tout moment des conflits entre eux, s'ils n'y prenaient pas garde. Et si, malgré tout, ils entraient quand même en guerre, j'aimerais tant être de ceux qui les exhortent à en sortir au plus vite en les encourageant à recourir à toutes leurs aptitudes à penser, à comprendre, à transiger puis à tolérer…
Sans doute n'est-ce pas la faute du miroir médiatique s'il reflète aussi le laid et l'abominable mais, tant qu'à faire, cassons-le donc une fois pour toutes si, à force de nous montrer l'horreur, il nous la rend admissible et risque de nous la faire prendre pour le beau et le normal ! »
“[Matériau … « noble » que] le mot, celui-là même sans lequel on ne saurait conférer aux objets toute leur valeur ! Avec lui, on peut révérer le beau, fustiger l'horreur, saisir la nuance… Il aide à exalter, à exhausser et à émouvoir dans le sens positif du terme parce qu'en donnant à voir, à entendre, à sentir et à ressentir, il permet de choisir devant n'importe quelle situation la meilleure alternative. Fait de sons, choisis avec minutie, et de sens, bien réfléchi, le mot est sans conteste le meilleur outil pour réconcilier à un moment donné les pires antagonismes qu'il a pu susciter à un autre moment !”
« (…) Tant pis si, après tout, je ne suis peut-être pas un vrai journaliste (…), incapable que je suis de narrer les idylles tourmentées et les émoluments scandaleux de quelques stars prétentieuses dans le monde de la chanson ou du sport, des médias ou du show-biz ! De toute façon, je ne suis pas plus à l'aise pour raconter les frasques des putains de toutes les Républiques ou les flambées d'actions de tels ou tels « start-upistes ». Enfin, je ne suis guère plus apte à relater les revers ou les regains de bonheur conjugal et/ou de fortune des fringants capitaines d'industries ! … »
Extrait de Pourquoi, diable, ai-je voulu devenir journaliste ?
« Les périodiques datant de l'indépendance peinent pour trouver un second souffle à l'image de la plupart des pays africains. La fin des rivalités Est-Ouest réduit de manière considérable l'intérêt des deux blocs pour le continent.
Le réveil des nationalités en Europe de l'Est banalise jusqu'à les légitimer les guerres ethniques alors même que l'Afrique s'ouvre avec violence à la démocratie et qu'y rôde le spectre de l'anarchie.
Démonter les mécanismes qui permettent à l'Afrique de survivre alors qu'elle est donnée pour moribonde depuis longtemps,
Stopper sa dérive qui est d'abord et avant tout intellectuelle,
Réconcilier ses nouvelles élites avec l'espoir,
Faire en sorte que l'Afrique intéresse à nouveau l'Europe et qu'avec cette dernière se développent des échanges plutôt qu'une fausse assistance perpétuelle,
En somme, aider à concevoir un vade-mecum pour des relations nouvelles s'appuyant sur les nécessaires solidarités et complémentarités économiques, sociales, culturelles, écologiques…
Voilà des exemples de domaines d'investigations à explorer pour les porter à la connaissance des Africains et des Européens ! »
Extrait de “Plaidoyer pro domo pour une bourse de l'Académie Prisma Presse”, dans Pourquoi, diable, ai-je voulu devenir journaliste ?
“Envoyés spéciaux tous azimuts, sachez par moments arrêter de filmer une information dès qu'elle est horrible, sans pour autant cesser de nous en rendre compte. Nous vous croirons sur parole si vous nous racontez juste ce dont vous-mêmes avez été les témoins.
“Présentateurs de journaux télévisés, vous n'avez pas, vous non plus, besoin de nous montrer et remontrer les carotides tranchées, les jambes et les bras coupés, les rues jonchées d'hommes, de femmes et d'enfants massacrés, pour nous convaincre de l'authenticité d'un événement tragique…
D'ailleurs, parmi vous, plusieurs savent très bien articuler les termes comme « égorger » pour parler des Algériens qui en tuent d'autres au couteau ou « mutiler à la machette » ou, encore, « exécuter à coups de gourdins » quand ce n'est pas « nettoyer ethniquement » pour évoquer le sort des Burundais, Rwandais, Libériens, Sierra Léonais et autres ex Yougoslaves…
Ils sont sans doute… télégéniques à souhait les génocides réciproques et récurrents, ici et là, de populations rendues ennemies par la mégalomanie de leurs chefs. Le sont encore plus les attentats à la vie d'étrangers continuant de s'égarer — on ne sait trop comment ni pourquoi — dans ces zones que, depuis plusieurs années, la communauté internationale accepte de voir gagnées par la barbarie !
Mais combien elles sont insupportables, aussi, les scènes désormais coutumières où des « reporters d'images » équipés de matériels audiovisuels de pointe, des gens civilisés donc, en quémandant des interviews, « mettent en boîte » des bourreaux, des tortionnaires, des barbares, des bêtes sauvages, des monstres dans l'exercice de leurs prédations sanguinaires (…)”
Extrait de “Le droit à l'image contre le droit à l'info”, article paru dans Jeune Afrique n° 1993 du 23 au 29 mars 1999. Repris dans Pourquoi, diable, ai-je voulu devenir journaliste ?
“L'Internet existe en Afrique aussi où quelques hauts cadres et plusieurs commerçants équipés permettent autour d'eux à des milliers de gens d'en profiter. On observe, du reste, une prolifération de Webcafés à côté ou en lieu et place des anciens centres téléphoniques. Sans compter tous les équipements performants à la disposition des abonnés dans la plupart des centres culturels d'ambassades étrangères. Les Africains privilégiés, acheteurs potentiels de presse écrite, ont donc accès à la Toile qui regorge d'annonces brutes, instantanées, sensationnelles, alléchantes, parmi lesquelles la rumeur, la malveillance, la diffamation, la désinformation, la tentation consumériste, le harcèlement médiatique même, exercices particulièrement prisés par beaucoup d'internautes de tous pays, ont d'ailleurs tendance à supplanter les infos triées, vérifiées, recoupées, bien traitées et mises en perspective. La course à la divulgation de « l'info » est, par conséquent, d'avance gagnée par ce média nouveau dont la déontologie mettra du temps à devenir opérationnelle. Le magazine qui n'en tient aucun compte, de nos jours, court vers une véritable déconvenue.
Alors, tout en s'abstenant de développer des dépêches hâtives et des flashes approximatifs, disponibles sur les sites les plus divers, un magazine différent gagnerait par ailleurs à mettre au rebut tous les marronniers : le sida qui va bientôt rayer le continent de la carte du monde, la malédiction « originelle » de ces pays en queue de liste dans le classement selon l'indice de développement humain, la famine qui ressuscite ici, la sécheresse qui revient là, les inondations par-ci, les guerres tribales par-là, le putsch raté dans un pays, le coup d'État réussi dans un autre, les élections truquées partout…
A vrai dire, il ne s'agit nullement d'occulter ces faits têtus, — et ô combien désespérants ! — mais de les traiter de façon différente en insistant sur les quelques lueurs d'espoir qui existent malgré tout. Assez de journaux sont doués pour faire l'inventaire des maux et des constats de faillite africains, assez de publications se complaisent dans leur manque d'imagination à suggérer des issues de secours pour en rajouter. Il est juste temps que nos propres médias nous aident réellement à explorer les voies et moyens de sortir de ce qui n'est pas une fatalité: la soi-disant spirale infernale africaine ! (…)
IL ne faut, en aucun cas, craindre de faire beaucoup de place à l'analyse, à la réflexion, au débat — faut-il ajouter contradictoire ? — à la prospective voire à l'irritation et à l'indignation individuelle et collective non seulement des élites mais aussi et surtout des populations africaines. Les unes et les autres savent si bien le faire quand elles ne sont pas mises à l'écart de façon presque systématique devant les entreprises qui les concernent.
Quel intérêt pour nous de savoir tous les ans le classement des plus grandes fortunes du monde ? Et cette relation strictement sensationnelle de certains scandales internationaux, n'accrédite-t-elle pas en Afrique l'idée que la corruption est la chose au monde la mieux partagée et qu'on ne peut donc rien y faire ? A-t-on jamais expliqué avec la conviction nécessaire que les plus petits détournements de fonds publics africains, ridicules sans doute devant les millions de fonds secrets et les milliards de prises illégales d'intérêts — « broutilles » vite évaporées dans les pays riches — sont des manque à gagner suicidaires pour les plus prospères des pays d'Afrique ?”
Félicitations et suggestions à L'Autre Afrique à l'occasion de sa renaissance. L'A.A n°2, août 2001. Repris dans Pourquoi, diable, ai-je voulu devenir journaliste ?
“Nelson Mandela, a révélé à sa libération une personnalité d'une envergure encore plus grande que celle bâtie par la légende autour du prisonnier de Robben Island. Homme d'État envié du monde entier, il aura tracé le chemin de la réconciliation entre bourreaux et victimes de l'Apartheid. Et, tout en finesse, il aura même su passer le témoin puisqu'il a la modestie, lui, de ne pas se sentir investi d'un quelconque pouvoir messianique. A lui surtout, l'Afrique doit une rente pour l'éternité et non pas à perpétuité, l'incompressibilité dont cette dernière pourrait être assortie étant toujours limitative. En sachant, du reste, que son ouverture d'esprit lui dicte sans doute des préoccupations d'un tout autre ordre et que, de toute évidence, elle l'empêche de se faire des illusions sur les bégaiements de l'Histoire et la versatilité de ses témoins.”
“La grande « maladie » de beaucoup de leaders politiques africains dont on aurait pu penser les plus jeunes prémunis, c'est de ne pouvoir se dépouiller de leurs oripeaux de syndicalistes (travailleurs ou étudiants) ou de chefs de maquis pour revêtir des habits d'hommes d'État. Leurs partis ne recrutant en priorité que dans les limites de leurs ethnies, ils ne sollicitent de leurs militants que les muscles des bras et ceux des mollets préférant laisser en jachère leurs coeurs et leurs cerveaux. Bouleversante alors est la confusion des esprits qui conduit certains à fouler aux pieds non seulement la politique nationale mais la géopolitique sous-régionale, régionale et internationale la plus élémentaire !”
“Tout le travail politique de la prochaine décennie devrait consister à stopper la circulation anarchique des armes de guerre avant de faire un grand tri de sorte à reconstituer des armées régulières avec le statut digne qui est le leur et le rôle qu'elles n'auraient jamais dû abandonner : la défense et l'aménagement du territoire. Il est tout de même paradoxal, plutôt tragique de constater avec quelle régularité des pays dirigés par des Généraux voire des Maréchaux sont déstabilisés par les bandes armées les plus dépenaillées. Pour positive qu'ait été l'irruption sur la scène politique de militaires de la valeur de Thomas Sankara, Jerry Rawlings ou Toumani Touré, le travail dévolu à un militaire est de préserver la paix intérieure et de défendre la patrie contre les agressions extérieures.
Pour en revenir à la politique pure, il existe un réel danger que les habitudes de manipulation de politiciens peu scrupuleux aient produit des « clones » de Idi Amin Dada, Jean-Bedel Bokassa, Sékou Touré, Mobutu Sese Seko et Robert Mugabe, entre autres. Mais il n'est pas interdit non plus de rêver que s'affirmeront plus nombreux, dans un avenir très proche, des émules de Léopold Sédar Senghor et de Nelson Mandela”.
Extraits de « En finir avec tous les rentiers de la politique en Afrique ! » article paru sur Africultures (rubrique « Articles des Lecteurs »), le 3 février 2003. Repris dans Pourquoi, diable, ai-je voulu devenir journaliste ?
Je ne conçois pas autrement l'acte d'écrire ni celui de lire que comme une envie irrépressible de partager et, donc, un élan de générosité irréversible lui aussi. »
Extrait de la quatrième de couverture de Trente-deux ans de rétention
« Pourquoi un écrivain ne devrait-il pas pouvoir vivre de ses écrits de façon convenable comme un boulanger de son pain, un viticulteur de son vin, un orfèvre de ses bijoux ? … Bons ou mauvais écrivains, c'est aux lecteurs dont on n'aura pas obscurci le jugement d'en décider. »
Extrait de Trente-deux ans de rétention
“[Si l'écriture peut être rapprochée de la cuisine et de la pâtisserie, je n'accours pas à «la houellebecquée » ni ne touche à « la loanane ». Je ne me laisse pas tenter non plus par « la breillatine » et ne succombe pas à « l'angoïsme », écoeuré que je suis par les moisissures favorites d'une certaine Amélie Nothomb. Pour tout dire], je préfère la pâtisserie d'un Brillat-Savarin, ancien personnage illustre de mon département d'adoption, disciple de Voltaire et de Rousseau, admirateur de Buffon et de Fénelon, littérateur talentueux lui-même, comme de juste, et fin gastronome aux recettes toujours épicuriennes.
Je refuse, d'une manière générale, les produits illicites et ceux dont il faut modérer la consommation. Non pas parce qu'ils sont interdits ou réglementés mais parce que pour écrire, je n'ai pas besoin d'halluciner. Le beau, le laid, le bon et l'abominable, je suis apte à l'imaginer et à en rendre compte sans coup de pouce chimique.
Je refuse de ne relater que ce qui gravite autour de moi, de façon exclusive et tiens plutôt à raconter ce qui touche au Guinéen, à l'Africain, à l'Humain. Le moi, le mien n'est pas haïssable en soi, mais il est tellement beau dissous dans le nous, le nôtre…D'empathie pour moi-même, je ne peux avoir que par ricochets, par effets boomerang. (…) Et, j'incline d'autant plus volontiers à partager le bonheur de tous ceux qui sont heureux.
Je refuse enfin d'écrire à l'africaine pour les seuls Africains ou les amateurs de littératures exotiques. (…) A la fois Guinéen, Africain, Français, Européen, Humain… de naissance et/ou de papiers, doué de sensibilité et de raison — je l'espère — j'essaie de communiquer aux humains mes semblables — en français, puisque je n'ai pas le choix — quelques-unes [des] émotions que j'ai envie de partager avec eux…”
Extrait de “Résistance d'écrivain”, article paru sur Africultures (rubrique “Engagement de l'écrivain africain”) le 13 octobre 2004. Le texte intégral se trouve dans Trente-deux ans de rétention
“Seules l'écriture et la parole, réhabilitées, nous guériront dans un avenir qui reste à préparer de la morbide fascination pour les images et nous délivreront de leur dictature.”
Extrait de Pourquoi, diable n'ai-je pas été un griot ?
« Et comment donc arriver à garder le cap ? Quand la plupart des conseillers en voyages littéraires se sont eux-mêmes égarés dans les maquis des écritures surfant sur des goûts spécieux : les révélations scabreuses, les transgressions (fausses ou vraies, petites ou grandes), les violences gratuites, les bas instincts et les mauvais sentiments… seuls thèmes qui seraient générateurs de bons romans ! Que faire ? Quand ceux qui passent encore pour les défenseurs de la littérature sont à leur tour bluffés par les croque-morts de la même littérature, par ailleurs très bons vendeurs de “livres” ! Entrer en résistance ou ne pas entrer ? Longtemps, c'est la question qui se posera à toutes les parties prenantes en littérature. »
“Pourquoi continuer de supposer un auteur toujours mieux inspiré dans sa langue identitaire et ne subissant de ses langues d'emprunt qu'un diktat dévastateur ? Avec la maîtrise plus ou moins parfaite de plusieurs moyens d'expression, un écrivain « trans-ethnique », « transnational », « transcontinental » ne devrait-il pas être, au contraire, capable de produire une prose originale, sertie comme un bijou des subtilités de la langue devenue de facto sa langue maternelle et des nuances de ses langues annexes ? Irriguée par un imaginaire d'appoint, la langue d'autrui ne serait-elle pas, en quelque sorte, le véhicule idéal permettant de soustraire son usager de toute assignation à résidence et même, de manière fictive, de lui faire renouer avec sa « langue morte » ?
Si n'étaient autorisés à écrire dans une langue que ceux qui l'avaient acquise par le droit du sang, la littérature s'en porterait encore moins bien, à coup sûr”.
Extraits de l'article “Sa langue, qu'est-ce qu'elle a sa langue ?” article paru dans la revue Riveneuve Continents n°3, Automne 2005. p. 297 et 298
“Écrire mieux, serait-ce le faire dans une transparence à en devenir translucide soi-même ?” (…) En d'autres termes, serait-ce encore écrire que de frétiller comme un poisson rouge avec ses reflets flatteurs dans un bocal ? Ou tel un paon faisant la roue en permanence pour racoler autour de lui, fier (…) de son ramage et plus encore du plumage autour de son croupion ? Ou à l'instar d'un gecko ou d'une salamandre offrant à la vue générale ce qu'ils possèdent de plus précieux que « la prunelle des yeux » : leurs entrailles et leurs humeurs ? Ou, enfin, à l'image d'un caméléon faisant don de son corps à la branche d'arbre sur laquelle il se déplace ?
Extrait de A Dongora, coulera à nouveau la rivière ». Roman.
Lire ! lire encore ! lire toujours !
“Une catastrophe naturelle (séisme, sécheresse, incendie, inondation…) frappe-t-elle sans discrimination une région ? Elle s'en relève toujours.
— Mais les guerres et les génocides laissent, quant à eux, des séquelles durables, plus difficilement « résiliables » à cause du tri sélectif opéré entre ceux qui auraient dû rester des compatriotes.
— Négationnismes et révisionnismes de toutes sortes rôdent autour de l'histoire de la Guinée.
— Il incombe aux écrivains de combler les moindres trous de mémoire. Quand les Guinéens oseront se regarder en face, ils assumeront vite leur passé et envisageront, sereins, un avenir réconcilié.
— Il est impératif de ne pas cultiver les seuls muscles de ses bras et de ses mollets ! Lire, lire ! Lire encore ! Lire toujours ! De tout, sur tout, partout, de façon à « se muscler » le cerveau et l'esprit, aussi !
— Et pouvoir disposer, après, de ce qu'on pourrait appeler — en comparaison des constructions japonaises — des « réflexes parasismiques » aptes à prémunir la Guinée des tremblements et autres fractures sociales ayant détruit les pays à ses frontières. Ainsi, les Guinéens sauront-ils aménager dans leurs têtes ces digues faites de bon sens et de raison qui empêcheront l'inondation et la submersion de leurs coeurs par la haine destructrice. »
Extrait de “Les bonheurs du 4ème Salon du Livre de Conakry”. Article paru sur Africultures d'abord le 14 décembre 2004 au Forum “Engagement de l'écrivain africain”. Puis le 3 janvier 2005 sous la rubrique “Littérature”.
« PLUS question de continuer à jouer les grands griots de la mythologie mandingue édulcorée, simples témoins émerveillés du pèlerinage fastueux d'un certain roi à La Mecque ou du recouvrement miraculeux de l'usage de ses jambes par un autre ou de la tactique de la terre brûlée utilisée par un autre encore comme moyen de résistance à l'occupation coloniale ! Ils ont déjà fait leur temps, tout leur temps. Nous leur en avons été suffisamment reconnaissants et nous le demeurerons. Avec moins de tam-tams et de balafons, cependant. »
« Les nouveaux griots s'abstiendraient (…) de tresser des lauriers aux plus grands bâtisseurs si ces derniers se rendaient coupables des moindres manquements aux droits élémentaires de leurs concitoyens… »
Extrait de Pourquoi, diable, n'ai-je pas été un griot ?
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