André Lewin
Ahmed Sékou Touré (1922-1984).
Président de la Guinée de 1958 à 1984.
Paris. L'Harmattan. 2010. Volume 2. 263 pages
Chapitre 56. — 17 juillet 1964
Diallo Telli élu Secrétaire général de l'OUA, un peu malgré Sékou Touré
Compte tenu de sa personnalité, de son expérience, de ses relations, de l'influence qu'il exerce déjà, il n'est pas étonnant que beaucoup songent à Diallo Telli pour être le premier Secrétaire général de l'organisation qui va naître. D'après ce qu'on peut savoir, il y pense également lui-même. La conjoncture politique est d'ailleurs favorable au candidat guinéen, puisque les pays francophones détiennent une nette majorité : sur trente-deux États présents, observateurs ou invités à Addis Abeba, vingt-et-un sont totalement ou partiellement francophones.
S'il est vrai que Sékou Touré a souhaité pousser la candidature d'Ismaël Touré, celui-ci n'a guère de chances d'être choisi ; même des leaders amis du président guinéen comme Nasser ou Ben Bella ont mis leur poids dans la balance en faveur de Telli. De plus, Ismaël Touré, qui a déjà représenté la Guinée aux réunions de l'autre instance africaine d'Addis Abeba, la Commission Économique des Nations unies pour l'Afrique (CEA) 110, passe à tort ou à raison pour lié à cette institution plutôt qu'à la nouvelle organisation. Le tempérament ambitieux, calculateur et peu accommodant du demi-frère redouté de Sékou Touré peut enfin effrayer certains chefs d'État, qui craignent qu'il ne soit à l'OUA un porte-parole des positions de Conakry encore plus radical que le leader guinéen, qui semble à l'époque se modérer.
A défaut d'Ismaël, Sékou Touré songe également, dit-on, à présenter la candidature de Lansana Béavogui, son ministre des Affaires étrangères ; mais ce dernier n'a ni la stature, ni l'expérience, ni l'audience internationales de Telli. Aussi Sékou se laisse-t-il finalement convaincre et donne-t-il le feu vert à la candidature de Diallo Telli. Mais il ne le fait pas de gaieté de coeur et affirme alors à certains de ses interlocuteurs, sur le ton péremptoire et légèrement menaçant qui est parfois le sien :
— Bon, c'est d'accord, mais vous verrez, il nous trahira, nous et la Révolution.
Lors de la réunion de l'UAM qui se tient à Dakar avant que ne s'ouvre dans la capitale sénégalaise, en août 1963, le premier Conseil des ministres de l'OUA, il apparaît cependant que nombre de pays francophones appuieront plutôt un autre candidat, le Dr Émile Derlin Zinsou, celui-là même qui sera quelques années plus tard président du Dahomey. Le président Houphouët-Boigny revient cependant sur ce choix, estimant qu'il sera plus utile et facile au groupe modéré de l'UAM de formuler avis et critiques vis-à-vis d'un Secrétaire général qui ne serait pas issu de ses rangs.
Le soutien des francophones modérés à leur propre candidat ne sera donc pas unanime. De plus, le bruit s'est répandu dans les couloirs que le Dr Zinsou serait pro-israélien, ce qui provoque des réactions négatives de pays francophones à forte population arabe ou musulmane, telle la Mauritanie, qui auraient autrement pu voter pour lui.
A la réunion ministérielle qui s'ouvre le 2 août 1963 à Dakar, Diallo Telli, malgré tous ses atouts, ne parvient cependant pas à réunir la majorité nécessaire de dix-sept voix : il en obtient quinze, avec trois votes négatifs et douze abstentions. L'autre candidat, l'Éthiopien qui assurait l'intérim du secrétariat général depuis le sommet de mai, le Dr Tesfaye Gebre-Egzy, doit malgré tout se retirer, Addis Abeba, qui brigue déjà l'honneur d'abriter le siège de l'organisation, ne pouvant prétendre à tout ; devant l'absence de Secrétaire général régulièrement élu, il continuera cependant à occuper provisoirement ses fonctions, et ce avec une grande efficacité. Le choix définitif du Secrétaire général appartient de toutes façons, de par la Charte, au prochain Sommet, le rôle du Conseil des ministres n'étant en la circonstance qu'indicatif 111.
Ce premier Conseil se contente donc de recommander Addis Abeba comme siège de l'OUA 112, ainsi que la constitution officielle d'un groupe africain à l'ONU. Et Telli repart pour New York pour quelques mois, en attendant que les choses soient mûres.
Cependant que le 10 août 1963, Radio Conakry a cru pouvoir annoncer prématurément sa nomination au poste de Secrétaire général !
Constatant l'impasse et craignant que des candidatures divergentes n'aboutissent à rendre impossible l'élection du Secrétaire général selon la procédure prévue par la Charte, Sékou Touré fait à certains chefs d'État une autre proposition, dont l'acceptation aurait d'ailleurs très probablement fait perdre toute chance à Telli. Dans une lettre du 14 août 1963 adressée au président Hamani Diori du Niger, il s'inquiète du "vide administratif" qui risque de se prolonger à la tête de l'institution qui vient d'être créée, et suggère que le secrétaire général administratif provisoire, le Dr Gebre-Egzy, s'adjoigne un comité d'experts composé de représentants du Nigeria, de la République arabe unie, du Ghana, du Niger, du Congo-Brazzaville et de l'Ouganda, afin qu'ensemble, ceux-ci désignent un Secrétaire général avant le 30 septembre. Cette idée n'est reprise par personne, et la situation se prolonge pendant près d'un an.
Le deuxième Conseil des ministres, tenu en février 1964 à Lagos, ne pourra pas lui non plus trancher la question, et c'est finalement le deuxième Sommet de l'OUA, réuni au Caire dans les bâtiments de la Ligue arabe du 17 au 21 juillet 1964, qui procédera à l'élection. Cette fois-ci, Diallo Telli obtiendra vingt-trois voix sur trente-trois, soit légèrement plus que la majorité requise des deux tiers.
Son concurrent le plus sérieux, Émile Derlin Zinsou, ne réussira pas la percée qu'il espérait. Modibo Keita, président du Mali, qui est pourtant un ami de toujours du Dr Zinsou, prononce d'ailleurs une chaleureuse intervention en faveur de Diallo Telli. Avant le vote décisif, quelques suffrages isolés se portent aussi sur Mongi Slim (Tunisie) et sur le Dr Gebre-Egzy, qui avait évidenunent la faveur de quelques anglophones et de l'Éthiopie.
Dans l'ensemble, on peut dire que si le représentant guinéen est élu, c'est, en plus de ses éminentes qualités personnelles, d'une part parce qu'il est francophone et que cela lui assure plusieurs voix 113, et d'autre part parce qu'il appartient à l'un des pays progressistes à un moment où ceux-ci manoeuvrent avec assez d'habileté pour avoir le vent en poupe.
Pendant une vingtaine d'années, la tradition se maintiendra d'avoir à l'OUA un Secrétaire général francophone 114, cependant que le Secrétaire général des Nations unies désignera comme secrétaire exécutif de la CEA un Africain anglophone 115. Depuis les années 80, il y a eu deux francophones à la CEA, et deux anglophones à l'OUA.
Un Guinéen, H. Soumaré, se trouve aux côtés de Diallo Telli comme secrétaire particulier et chef de cabinet. Après 1966, il deviendra chef du service du personnel. Soumaré accompagne Telli au cours de presque tous ses déplacements. Pour certains observateurs, ce fonctionnaire guinéen est un agent à la solde de Sékou Touré, chargé de lui rapporter tous les faits, gestes et paroles du secrétaire général ; pour d'autres, il s'agit plutôt d'un garde du corps que, par prudence, Diallo Telli a décidé d'avoir auprès de lui.
Il n'aurait pas choisi de maintenir à ces fonctions quelqu'un en qui il n'aurait pas eu totalement confiance. D'ailleurs Soumaré sera lui aussi en butte à l'hostilité de Sékou Touré, qui au moment du retour de Diallo Telli en Guinée en 1972, a voulu le faire revenir lui aussi, notamment en exerçant des pressions sur ses proches.
Au terme de ses huit années de mandat, en 1972, Diallo Telli n'aura plus en face de lui que neuf des trente deux chefs d'État qui avaient participé au sommet du Caire 116, tant il y a eu de coups d'État, d'assassinats, de démissions. Déjà en 1968, sa réélection aura été difficile ; en 1972, elle s'avérera impossible.
L'ancien ministre guinéen Alpha-Abdoulaye Diallo raconte dans son livre La vérité du ministre comment il a vécu ces péripéties :
"La réélection de Diallo Telli au sommet d'Alger, en 1968, sera difficile, malgré les interventions conjuguées en sa faveur de l'empereur Hailé Sélassié, des présidents William V. S. Tubman du Liberia et Boumediène d'Algérie. Sékou Touré, d'ailleurs absent, n y était pas favorable. Il s'était fait représenter à ce sommet par Léon Maka, alors président de l'Assemblée nationale. Pour ma part, je dirigeais la délégation guinéenne au Conseil des ministres ; j'avais été élu vice-président chargé de la commission politique à cette douzième session du Conseil (…). Les instructions que j'avais reçues de Sékou Touré étaient de m'opposer à l'élection de Telli. Je réussis à le convaincre que nous devrions observer une position de neutralité. "117
Finalement, pour autant qu'on puisse le savoir puisqu'il s'agit d'un scrutin secret, la délégation guinéenne vota quand même pour son compatriote.
Diallo Telli est amené à intervenir directement chaque fois que des différends interétatiques menacent le fonctionnement même de l'institution dont il est chargé. L'esprit unitaire qui a soufflé en 1963 n'empêche pas en effet que se prolongent au niveau des organes de l'OUA les querelles diplomatiques entre les régimes et les leaders des États. Sans compromettre l'existence de l'institution, cette situation met en cause la notion même d'organisation internationale : lorsque des pays membres estiment en effet ne pas pouvoir siéger dès lors que leurs conceptions ou leurs intérêts ne sont pas pleinement pris en compte, ou que leur délégations refusent de siéger aux côtés de gouvernements dont ils critiquent l'orientation, l'esprit de la coopération multilatérale est compromis. Diallo Telli a donc dû fermement s'impliquer, notamment les premières années, pour maintenir un minimum de travail en commun ; encore plus quand, à plusieurs reprises, ce sera son propre pays, la Guinée, qui sera en cause.
Dès le début de 1966, le coup d'État qui coûte son poste à Nkrumah crée de nouvelles difficultés, suscitées cette fois-ci par les pays "révolutionnaires", et particulièrement la Guinée, Sékou Touré engageant avec les nouveaux dirigeants du pays une vive controverse, avant d'accueillir chez lui l'ancien président et de le nommer co-président de la Guinée 118.
Le Conseil des ministres de l'OUA qui se tient au lendemain du coup d'État décide, après d'âpres discussions, d'admettre la délégation du nouveau Conseil national de libération. Dès le 1er mars, la Guinée et le Mali décident alors de ne plus siéger à Addis Abeba, suivis peu après par la Tanzanie et la RAU [Egypte]. La discussion sur le problème rhodésien ayant abouti à une résolution trop édulcorée à leurs yeux, d'autres délégations quittent encore la salle du Conseil : l'Algérie, la Somalie, le Kenya, le Congo-Brazzaville. Huit pays "révolutionnaires" boycottent donc l'organisation en ce début de 1966, au grand dam de Telli qui doit cependant reconnaître qu'en 1965, un nombre identique de pays "modérés" en avaient déjà fait autant. Le Secrétaire général peut craindre alors que la participation aux réunions de l'OUA ne devienne un problème majeur, dépendant d'un perpétuel exercice de bascule entre les pays progressistes et les pays modérés.
La virulence des attaques lancées par Sékou Touré contre les nouveaux dirigeants du Ghana, en effet, ne diminue en rien, au contraire. Le leader guinéen annonce qu'il n'assistera plus désormais aux réunions de l'OUA si celle-ci accepte sans réagir que l'un des "pères" de l'Afrique soit éliminé. Il tiendra parole pendant treize ans. Peu après, des ressortissants ghanéens, notamment des étudiants, sont retenus à Conakry. Alors que la situation ne cesse de se tendre entre la Guinée et la Ghana, Diallo Telli part néanmoins en congé le 20 août 1966, laissant la gestion de l'organisation au secrétaire général adjoint Yolah. Celui-ci affirme ne pas avoir de nouvelles de Telli jusqu'à son retour à la mi-octobre, date-limite pour l'envoi aux pays membres du rapport général destiné à préparer le Conseil des ministres et le prochain sommet. Or le secrétariat a les plus grandes inquiétudes à ce sujet, craignant notamment qu'un trop grand nombre d'absences parmi les délégations n'empêche d'atteindre le quorum. De plus, le bruit court que Sékou Touré désignera Nkrumah comme chef de la délégation guinéenne, ou du moins l'inclura dans la délégation de la Guinée, ce qui, évidemment, risque de créer des incidents.
Le nouveau gouvernement d'Accra, pour sa part, manifeste depuis février une évidente suspicion envers le Secrétaire général de l'OUA. Il lui reproche d'avoir fait preuve de partialité à son encontre lorsque le Conseil des ministres a dû se prononcer quant à la représentation du Ghana, puis de s'être rendu à Conakry pour y rencontrer Sékou Touré et Nkrumah ; il se plaint également de l'inaction de Telli lorsqu'il s'est agi de faire pression sur Conakry pour tenter d'obtenir le départ des étudiants et diplomates ghanéens retenus.
D'ailleurs, les réactions ghanéennes ne se font pas attendre. Le 29 octobre 1966, l'avion de la compagnie américaine PANAM qui amène la délégation guinéenne au Conseil des ministres et au troisième sommet de l'OUA, dont fait partie le ministre des Affaires étrangères Lansana Béavogui, est bloqué lorsqu'il fait escale à Accra sur le trajet Conakry-Lagos.
Les membres de la délégation et des étudiants guinéens qui étaient à bord sont arrêtés. Un communiqué du gouvernement ghanéen explique qu'il a été "amené à prendre de telles mesures pour obtenir réparation d'un pays qui a montré un total mépris des coutumes internationales", et qu'il exige la libération des étudiants ghanéens toujours détenus à Conakry.
Nouveaux soucis pour Diallo Telli, d'autant qu'il sent bien qu'il s'agit pour Sékou Touré d'une affaire capitale et que toute fausse manoeuvre de sa part risque de lui coûter cher. Mais le secrétaire général d'une organisation ne peut que s'entremettre lorsqu'une délégation officielle est menacée et encore plus arrêtée. A vrai dire, il n'y a aucun précédent en droit international, car tous les gouvernements du monde ont jusqu'ici respecté, même en temps de guerre, l'inviolabilité des délégués à une conférence internationale. Il n'y a par ailleurs aucun parallélisme à faire, en termes juridiques, entre la détention même arbitraire d'étudiants et l'arrestation d'une mission officielle.
Diallo Telli estime finalement difficile d'agir seul en sa qualité de Secrétaire général, son propre pays étant partie à ce différend. C'est donc une mission de bons offices composée de ministres du Congo-Kinshasa, du Kenya et de la Sierra Leone, qui est dépêchée tant à Conakry qu'à Accra, en priorité pour obtenir la libération de la délégation guinéenne mais aussi pour tenter d'améliorer durablement les relations entre les deux pays.
Les discussions sont extrêmement difficiles, mais la mission obtient finalement le 3 novembre que la Guinée laisse partir les Ghanéens qui le souhaitent, et le 5 novembre seulement que les dix-neuf membres de la délégation guinéenne puissent quitter Accra pour Addis Abeba, le jour même où s'ouvre le Sommet.
Seize délégations seulement sont représentées au niveau des chefs d'État ou de gouvernement, soit nettement moins de la moitié des États membres, qui sont maintenant au nombre de trente-six, l'admission du Botswana et du Lesotho ayant été prononcée en dépit des réticences de certains pays qui estimaient que ces nouveaux États étaient économiquement trop liés à l'Afrique du Sud.
Nouveau venu à Addis Abeba, l'Algérien Boumediène déclare avec justesse : "Le résultat le plus important de cette conférence est qu'elle ait pu se tenir." Pour Telli, c'est effectivement un sujet de satisfaction, que vient compléter avant la fin de l'année 1966 le succès d'une longue tournée qui l'amène dans neuf pays africains : Ouganda, Burundi, Rwanda, Congo-Kinshasa, Congo-Brazzaville, République centrafricaine, Tchad, Soudan, République arabe unie. Sa situation personnelle est alors bien meilleure qu'avant le sommet. Les reproches qu'il appréhendait de la part de certains pays francophones modérés et surtout de la délégation ghanéenne ne lui ont pas été adressés. Accra, qui souhaitait attaquer vivement le Secrétaire général, a dû au contraire se défendre par suite de l'arrestation de la délégation guinéenne, jugée par tous contraire à tous les usages diplomatiques et aux traditions africaines. Diallo Telli est même apparu comme celui qui a su obtenir de Conakry et d'Accra le règlement qui a permis de maintenir le sommet. Il peut se poser en conciliateur, comme celui qui a sauvé in extremis l'organisation dont il a la charge.
Au cours de toutes ces années où il se trouve à la tête de l'OUA, Telli a toujours tenu à proclamer bien haut sa fidélité envers Sékou Touré et la révolution guinéenne, affirmant même qu'il a souvent été leur porte-parole, ce qui est certainement inexact.
De fait, les lettres que Telli adresse de temps en temps à Sékou Touré, et que celui-ci prend soin de publier dans la presse locale, constituent d'extraordinaires exercices de style. Telli s'applique en effet avec infiniment de zèle à démontrer à quel point il a défendu les thèses guinéennes, et donc la politique de Sékou Touré lui-même.
Reportons-nous ainsi, par exemple, à cette lettre écrite d'Addis Abeba après la découverte, à Conakry, du complot de 1969, dit "complot des militaires". Diallo Telli a eu la désagréable surprise de voir son nom cité dans la presse — on ne sait qui a été l'informateur en l'occurrence — comme figurant sur la liste d'un projet de gouvernement des "comploteurs". Il se défend auprès de Sékou Touré en ces termes :
"J'ai été si horrifié à l'annonce, par l'agence Reuter, de la mention de mon nom sur la liste d'un gouvernement de trahison nationale que ma première réaction était de garder le silence tant il me paraissait impensable que je puisse être mêlé, directement ou indirectement, à un quelconque complot contre un régime pour le succès duquel j'ai offert et continue à offrir le meilleur de moi-même, pour le succès duquel il n y a pas de sacrifice que je ne sois prêt à consentir de tout coeur, un régime dont les ennemis, en Afrique et hors d'Afrique, n'ont cessé, au cours des douze dernières années, de me déclarer une guerre sans merci, de multiplier les pièges, les intrigues et les actes de sabotage de toutes sortes.
Au cours de ces douze dernières années, à l'occasion de toutes les épreuves imposées à la Guinée et à l'Afrique, les mêmes forces aux visages multiples qui s'opposent à notre combat légitime m'ont pris, vous le savez plus que tout autre, comme cible principale car, à travers moi, ce qui était visé en fait n'était autre chose que vous-même personnellement et l'action que vous avez inspirée, orientée et guidée au service de la Guinée, de l'Afrique et de l'humanité.
Pour avoir eu le grand honneur de vous représenter aux Nations unies six années durant et d'avoir exposé à la tribune de l'organisation internationale le message guinéen et sa contribution spécifique dans la solution de tous les problèmes auquel le monde était alors confronté, j'ai représenté à tel point la bête noire de nos ennemis ligués que, deux années durant, de 1962 à 1964, j'ai dû vivre constamment à New York sous la menace des tueurs de l'OAS (Organisation de l'armée secrète), des ligues coloniales de toutes sortes, des tenants de l'oppression raciale en Afrique australe et des représentants des diverses formes de l'impérialisme et du colonialisme que je n'avais cessé de dénoncer en votre nom. Et depuis que votre confiance et celle de nos amis désireux de rendre hommage à la contribution guinéenne au combat de libération et de réhabilitation de l'Afrique m'ont amené au poste ingrat et si difficile que j'occupe aujourd'hui, loin de désarmer, ces forces ont multiplié, raffiné et aiguisé leur hostilité à mon endroit et intensifié leurs pièges, leurs manoeuvres et leurs complots.
Qu'il s'agisse de la crise congolaise en 1964-1965, du problème des mercenaires européens au Congo et en Afrique centrale, de la crise grave du Nigeria, des nombreux différends interafricains ou du problème crucial de la décolonisation en Rhodésie, dans les colonies portugaises, en Namibie ou en Afrique du Sud, toutes les positions que j'ai prises, même dans les situations les plus difficiles, afin de demeurer fidèle à la haute mission que vous m'avez confiée et au devoir impérieux qui en découle pour moi, ont déclenché contre moi, de façon constante et perfide, la haine et les intrigues des ennemis jurés de l'émancipation africaine. Ce qui s'est passé en septembre dernier (1968) à Alger lors du renouvellement de mon mandat n'est qu'une illustration, certes éloquente, de la détermination de ces ennemis d'abattre à travers ma modeste personne votre action à la tête de la révolution guinéenne.
Ainsi, toute l'expérience que j'ai vécue au cours des douze dernières années montre à suffisance qu'en toutes circonstances les ennemis de la Guinée et de l'Afrique ont cherché constamment à m'abattre et à m'éliminer.
Les moyens ont pu être fort différents, mais l'objectif est demeuré toujours le même : éliminer un homme qui, par son action, ses attitudes et ses prises de position, constitue pour eux un élément insupportable du rayonnement de la révolution guinéenne.
Dans ce contexte, je trouvais ces accusations si grossières qu'il ny avait, de ma part, aucune nécessité de les démentir, persuadé que j'étais que vous-même, frère président, plus que n'importe qui, savez à quel point de telles accusations étaient étrangères et contraires à mon tempérament, à mon caractère, à mon attitude, à mon action, bref contraires à tout ce que vous savez de moi.
Néanmoins, après de nouvelles réflexions et afin d'éviter que mon silence ne soit interprété d'une tout autre manière, j'ai tenu à vous adresser le message télégraphique du 22 mai. Car, en raison de la communauté totale de destin et des liens indissolubles qui me lient et me lieront toujours à notre peuple, à ses aspirations, à son combat historique, des liens particuliers qui me lient personnellement à vous, à votre poste de guide suprême de notre révolution, je vous dois, à tous moment, toute la lumière sur mon comportement, mes réactions et mes attitudes politiques dans le combat solidaire que nous avons engagé au service d'un idéal commun de liberté, de dignité, de justice, de progrès et de paix au service de nos peuples."
On peut relever au passage dans cette lettre au moins deux inexactitudes ou exagérations manifestes. L'allusion à la constante menace, à New York, des tueurs de l'Organisation de l'année secrète française (OAS) pendant les années 1962 à 1964 est difficile à prendre au sérieux, alors que cette organisation, suscitée en réaction contre la politique du général de Gaulle en Algérie, n'a pratiquement plus eu d'activité réelle après l'indépendance de l'Algérie, et a toujours limité ses opérations aux territoires de l'Algérie et de la France. D'autant qu'on voit mal l'OAS, violemment anti-gaulliste, s'attaquer au représentant d'un chef d'État en butte à l'hostilité du général de Gaulle. Cette phraséologie était visiblement destinée à amadouer Sékou Touré, dont la paranoïa était toujours prompte à s'enflammer face à toute allusion à des activités secrètes françaises.
Par ailleurs, l'affirmation que le mandat de Telli à la tête de l'OUA avait failli ne pas être renouvelé en 1968 à Alger par suite des menées des adversaires de Sékou Touré est également une contrevérité évidente, si l'on se souvient de l'attitude pour le moins hostile de la délégation guinéenne avant cette élection.
Cette défense et illustration de ses activités par Diallo Telli lui-même n'est cependant quelque peu maladroite, plus que biaisée, que dans la mesure où il cherche avant tout à pouvoir continuer à remplir sa mission sans être trop "déstabilisé" par ceux qui — Sékou Touré en tête — lui vouent une inimitié certaine à Conakry. Ce type de réaction lui vaut néanmoins, ce n'est guère étonnant, quelques commentaires désobligeants et sarcastiques des opposants à Sékou Touré et à son régime de plus en plus répressif.
On peut ainsi mentionner l'opinion très critique exprimée par Sako Kondé dans son livre Guinée, le temps des fripouilles, paru en 1974 :
« Le cas de figure le plus banal que peut offrir la cour du roitelet guinéen (…) nous est donné par Diallo Telli. (…) De quoi s'agit-il précisément ? Diallo Telli apprend qu'une agence de presse étrangère a mêlé son nom au “complot” de mars 1969. Alors il entreprend laborieusement de se disculper à sa façon auprès de son maître.
Précisons tout de suite que pour nous, la question n'est pas de savoir si l'auteur de la lettre a pris ou n'a pas pris part audit “complot”. Ce qui est à noter, c'est plutôt sa façon d'organiser sa défense. En effet, le ton en est serf, l'encre visqueuse, le souffle déprimant. » 119
Et l'auteur conclut, après s'être interrogé sur le retour de Diallo Telli en Guinée, puisqu'il écrit son texte en 1974, après la fin du deuxième mandat du Guinéen à l'OUA :
"Une chose est certaine : quand on s'appelle Sékou Touré et qu'on a créé autour de soi un monde à sa propre image, c'est-à-dire un monde suant de démagogie et de bassesses, on sait ce que vaut une allégeance du genre de celle désespérément proclamée par Diallo Telli.
Une autre chose est certaine : c'est qu'au fond, le dictateur guinéen ne renouvelle pas tellement son jeu macabre. Un jeu élémentaire qui comporte deux temps : d'abord "tuer" politiquement ceux qu'il veut perdre, en leur commandant les besognes les plus dégradantes ; ensuite, les précipiter du haut de la roche tarpéienne en leur imputant les négativités et turpitudes de son régime. Je ne prédis rien du tout. Seulement, il y a de ces évidences qui méritent qu'on sy arrête."
Pages dures, en partie injustes car excessives, mais hélas prémonitoires.
Parfaitement informés des difficultés qui opposent régulièrement Sékou Touré et Diallo Telli, l'opposition guinéenne cherche en fait périodiquement à entrer en relations avec le Secrétaire général de l'OUA et à l'amener à se rallier. Sans pouvoir livrer nos sources, on peut faire état de contacts, par exemple, en août 1965, en novembre 1966, en juillet 1971, en juin 1972, parfois à Dakar, parfois à Lagos, parfois ailleurs. Bien entendu, au fur et à mesure que se rapproche l'échéance de la fin de son deuxième mandat de Secrétaire général, et donc l'heure du choix entre rentrer à Conakry ou rester à l'extérieur, Telli est davantage encore contacté par l'opposition. Certains croient même qu'il est prêt à s'engager de ce côté. Un témoignage auquel nous avons eu accès, évoquant une conversation datant de 1971, dont les auteurs souhaitent rester anonymes, tendrait à le prouver.
"Au début de l'année 1971, est-il rapporté, Diallo Telli sortit de sa réserve habituelle pour donner son avis sur la situation prévalant en Guinée et sur ses propres sentiments à l'égard de la France. Physiquement et moralement las, il semblait très abattu et nous eûmes l'impression que cette fois-ci le Secrétaire général de l'OUA était sincère.
Qualifiant le président guinéen “d'avatar africain de Hitler”, dont “la fureur démentielle confine à la haine raciale”, Telli expliqua qu'une répression impitoyable s'abat sur la Guinée, en particulier sur les élites, et plus sélectivement encore sur celles réputées francophiles. Lui même, dit-il, se sait l'objet d'une haine tenace et du mépris profond du chef de l'État qui le tient pour un agent français.
Interrogé sur les raisons qui l'ont néanmoins poussé à défendre le dictateur lors du débarquement portugais de novembre 1970, il se justifia en indiquant que cette action ne pouvait être admise par aucun pays, et encore moins par l'OUA, quelque opinion que l'on puisse avoir par ailleurs de Sékou Touré. Selon Diallo Telli, l'action portugaise fournissait de surcroît un renfort inespéré au chef de l'État pour se maintenir au pouvoir.
Résolument pessimiste sur l'avenir de son pays, il pense, dit-il, que seule la mort du dictateur pourra briser l'univers carcéral mis en place par le président guinéen et que la France n'obtiendra rien de Conakry, quelles que soient les promesses faites, tant que Sékou Touré sera en vie."
Cette "sortie" en opposition avec l'allégeance de façade affichée habituellement par Diallo Telli à l'égard de Sékou Touré, est assez symptomatique de la dégradation des rapports entre les deux hommes.
Quels que soient à l'époque ses sentiments réels vis-à-vis du régime guinéen ou de l'opposition à Sékou Touré, Telli, au début de 1971, commence certainement au fond de lui-même à s'interroger sur ses chances d'obtenir un troisième mandat. S'il affecte à ce sujet une certaine indifférence, que notent ses interlocuteurs d'Addis Abeba, il compte cependant ses amis et recense les pays qui pourraient lui apporter leur voix.
Telli sait qu'une nouvelle fois, il aura la Guinée contre lui, bien que l'influence de Sékou Touré se soit sensiblement dégradée au cours des dernières années à la suite des nombreux “complots” et de la répression qui les a suivis. Son propre nom, nous l'avons vu, a parfois été prononcé à l'occasion de ces affaires, et des membres de sa famille ont été inquiétés.
Sa femme Kadidiatou, malade, qui est rentrée en Guinée à cette époque auprès de sa famille pour s'y reposer et retrouver un peu de tranquillité d'esprit, a même été empêchée sur ordre de Sékou Touré d'embarquer dans l'avion qui devait la ramener en Éthiopie, et n'a pu pendant quelque temps y rejoindre son mari. On dit pourtant que le leader guinéen a demandé à Telli de revenir au pays, et lui aurait même proposé la vice-présidence et le portefeuille des Affaires étrangères ! Mais, conseillé par de nombreux chefs d'État et par la plupart de ses amis, Telli hésite à retourner en Guinée, car, même s'il n'en mesure pas encore toutes les tragiques conséquences, il connaît les sentiments de Sékou Touré et surtout d'Ismaël Touré à son égard.
En novembre 1971, il participe à la visite officielle que le général Yakubu Gowon, président du Nigeria, effectue à Conakry, sans nul doute en raison du rôle qu'il a joué dans le règlement de l'affaire du Biafra. Il est qualifié de “frère Diallo Telli” par Sékou Touré 120.
A la fin de janvier 1972, Telli profite de la session du Conseil de sécurité tenue à Addis Abeba pour faire une démarche personnelle auprès du Secrétaire général des Nations unies, Kurt Waldheim, avec lequel il a un entretien privé et confidentiel. En effet, si jamais il n'est pas réélu à Rabat et s'il décide alors de ne pas rentrer au pays, il estime que l'exil et l'opposition sont inconcevables pour quelqu'un qui a occupé les fonctions publiques nationales et internationales qui ont été les siennes. Aucun problème en revanche s'il peut obtenir un poste international éminent, par exemple dans le système des Nations unies, à New York ou à Genève.
A vrai dire, Telli avait certainement songé auparavant à se présenter lui-même à la succession d'U Thant à l'ONU, d'autant que le septième sommet de l'OUA avait en 1970 affirmé, par sa résolution 233 sur l'activité du groupe africain aux Nations unies, le souhait de l'Afrique de présenter un tel candidat.
Mais, en janvier 1971, alors que Diallo Telli se trouvait en pèlerinage à La Mecque, son directeur de cabinet, Maître Gérard Kamanda Wa Kamanda, était officiellement informé par le gouvernement d'Addis Abeba de la candidature à ce poste de Lidj Endelkatcheow Makkonen, représentant permanent de l'Ethiopie auprès de l'ONU, avec prière au secrétariat de l'OUA d'en aviser tous les pays membres. Kamanda réussit à différer toute décision jusqu'au retour de Telli, mais celui-ci ne pourra que s'exécuter, avec un vif regret cependant.
Cette tentative éthiopienne fera finalement long feu, mais trop de temps avait été perdu et Diallo Telli estimera pour diverses raisons qu'il n'est plus opportun de faire acte de candidature.
Telli tient donc à voir avec le nouveau Secrétaire général s'il n'y aurait pas une solution pour assurer son avenir. Les deux hommes se connaissent peu, mais leur conversation est détendue et plutôt franche. Kurt Waldheim a de la sympathie pour son collègue, et il a le souci de recruter à ses côtés davantage d'Africains de qualité. L'Afrique est, en effet, nettement sous-représentée au trente huitième étage des Nations unies, l'étage “noble”. Mais il ne connaît pas encore Sékou Touré — il ne le rencontrera pour la première fois qu'en mars 1974, à Conakry, et sera plutôt effrayé par sa personnalité — et il ne perçoit pas l'urgence de la requête que lui présente Telli. Il lui fait une réponse dilatoire et lui dit qu'ultérieurement, il y aura peut-être des possibilités.
Lorsque Waldheim retrouvera Diallo Telli comme ministre de la Justice, lors de sa visite officielle en Guinée deux années plus tard, l'engrenage fatal sera déjà enclenché.
A Conakry, trois jours avant le sommet de l'OUA à Rabat en 1972, Sékou Touré a procédé à un important remaniement gouvernemental, comme pour montrer à Telli que l'on n'a pas besoin de lui et qu'il ne doit compter sur aucune faveur. Lansana Béavogui est nommé au poste de premier ministre, créé à cette occasion, et Fily Sissoko prend le portefeuille des Affaires étrangères.
A la surprise générale, un membre de la délégation camerounaise dont personne n'avait jusque-là prononcé le nom, un anglophone, le ministre du Travail Nzo Ekangaki, sera élu le 14 juin nouveau Secrétaire général de l'Organisation de l'unité africaine, au septième tour de scrutin, par trente-deux voix contre huit au Voltaïque Zoromé. Le chef de l'État camerounais a admirablement manoeuvré. Quant à Telli, qui se voulait candidat de recours et qui n'a même pas pu réellement batailler, il voit ses espoirs et ses illusions anéantis.
Il se trouve placé devant le choix dramatique que justement il voulait éviter : rentrer ou ne pas rentrer en Guinée ?
Les conseils de prudence ne lui ont pas manqué. Ils émanent notamment des leaders africains les plus avertis et les mieux disposés, qui lui ont redit leurs préoccupations à Rabat. Les nombreux amis de Telli à travers le monde en font de même, oralement ou par écrit. Quelques chefs d'État et de gouvernement l'assurent cependant de leur soutien au cas où il lui arriverait quelque chose dans l'éventualité d'un retour dans son pays.
Ainsi Abdou Diouf, à l'époque depuis deux ans Premier ministre du Sénégal, lui propose de l'aider à trouver quelque chose, au Sénégal ou ailleurs, par exemple dans une institution africaine ou internationale, ce qui lui éviterait d'avoir à retourner en Guinée. Sékou Touré, de son côté, semble avoir utilisé des canaux personnels et familiaux pour faire pression sur Telli, qui décide finalement de revenir en Guinée. Alpha-Abdoulaye Diallo ‘Porthos’, qui est alors déjà emprisonné depuis plus d'un an au camp Boiro, se souvient de ses réflexions à ce sujet :
"Je n'arrive pas à comprendre ce qui a poussé Telli à regagner ce pays. Il ne pouvait pas ignorer toute la haine que Sékou Touré et son frère Ismaël Touré nourrissaient contre lui (…) En 1969, suite au “complot des militaires” dit complot Kaman-Fodéba, le régime avait fait dénoncer un certain nombre de cadres, dont moi-même, qui seront tous arrêtés en 1970-1971, à la seule l'exception de … Telli, simplement parce qu'il n'était pas en Guinée et qu'il assurait le secrétariat de l'OUA. Dans ces conditions, son retour en Guinée équivalait pour nous à une condamnation politique, à une confirmation de notre “participation au complot”. Aux yeux du peuple, il signifiait : Telli est revenu en Guinée, malgré l'arrestation de ceux avec lesquels il avait été dénoncé, parce que, lui, il est innocent. Je lui en voulais pour cette faute politique, qu'il était en train de payer de sa vie, hélas ! Je ne comprenais pas par quelle naïveté politique extrême, il avait pris une telle décision. Je ne comprenais pas et je ne comprends toujours pas. Nous avions appris, certes, que Sékou Touré s'était servi de certains des amis et des parents de Telli pour le convaincre de revenir en Guinée. Il aurait réuni aussi beaucoup de voyants pour le “travailler”. Tout cela, que j'avais présent à l'esprit, ne m'aidait guère à mieux comprendre. Je n'avais qu'une seule certitude : ce retour avait dû se faire contre la volonté de son épouse si charmante, si lucide et si posée. Elle était en grande partie la force de Telli. Elle avait dû se battre, essayer de le convaincre, mais n y avait pas réussi. J'en veux à Telli, et en même temps, je le plains sincèrement, du fond du coeur. Mais je plains encore plus son épouse Kadidiatou, qui supportera toute sa vie le plus lourd du poids de cette tragédie." 121
Début juillet 1976, le nom de Diallo Telli est prononcé lors du Sommet de l'OUA à Maurice comme possible candidat africain pour le poste de Secrétaire général de l'ONU, Kurt Waldheim étant de son côté candidat à un deuxième mandat 122.
Mais Diallo Telli est empêché de se joindre à la délégation guinéenne et retenu à Conakry ; quelques jours plus tard, il sera arrêté 123. Waldheim ne verra finalement aucun candidat africain présenté contre lui.
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