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André Lewin.
Ahmed Sékou Touré (1922-1984).
Président de la Guinée de 1958 à 1984.

Paris. L'Harmattan. 2010. Volume I. 236 pages


Chapitre 7
23 mars 1946 Fondation de l'Union Mandingue


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Au lendemain du deuxième conflit mondial, on trouvait en Guinée deux types de mouvements politiques. Les Français et les Africains dits “évolués” 149 militaient au sein de partis guinéens qui étaient le simple prolongements de formations politiques de la métropole; les autres Africains pouvaient adhérer aux associations ethniques, nées dans l'effervescence de l'immédiat après-guerre.
De toutes les colonies françaises, ces associations n'existaient pratiquement qu'en Guinée 150n, témoignage de la vigueur particulière du sentiment régional dans ce pays 150.

Constituées sur des bases exclusivement ethniques, elles défendaient les intérêts spécifiques de leurs membres et ne permettaient donc pas aux aspirations nationales de s'exprimer. Définir des positions coordonnées sur des sujets d'intérêt commun s'avérait difficile : ainsi, les diverses associations ethniques ne parvinrent pas à s'entendre sur l'implantation du premier lycée que la France proposa en 1946 de créer en Guinée, les Peuls souhaitant un lycée climatique établi dans le Fouta-Djalon, les autres ethnies un établissement qui serait installé dans la capitale ; faute d'accord, un simple cours secondaire fut ouvert à Conakry, transformé en Lycée en 1957 seulement.
Souvent créés et dirigés par une élite locale très francisée et proche de l'administration coloniale, ces “groupes de pression” n'avaient d'ambition que locale, développaient une vocation d'entraide mutuelle et ne menaient aucune activité militante d'envergure en faveur de l'autonomie ou de l'indépendance.
Tous les groupes ethniques de Guinée avaient ainsi donné naissance à de telles associations : l'Amicale Gilbert Vieillard pour les Peuls, créée le 7 décembre 1944 151 ; l'Union Forestière 152, fondée le 5 janvier 1946, pour les ethnies de la région forestière (Kissis, Guerzés, Tomas, etc. …) ; le Comité (ou Union) de la Basse Guinée, créé le 26 février 1946 et composé de Soussous ; l'Union du Mandé (ou Union Mandingue), créée le 23 mars 1946 et ouverte aux Malinkés, succédant à l'Union des Malinkés fondée le 13 mai 1944 ; l'Union des Insulaires pour les originaires des îles de Los ; l'Union des Toucouleurs ; l'Union des Métis, créée le 4 mai 1946 153, etc. …
Mais on trouve aussi des associations de jeunesse nées pendant la guerre (Foyer des jeunes de la Basse Guinée, Jeunesse du Fouta, Jeunesse de l'Union des Toucouleurs), des groupements à base religieuse (Association culturelle des Musulmans) ou des comités regroupant des originaires d'autres colonies (Union sénégalaise — fondée en 1934 —, Foyer Sénégalais ou Union des Dahoméens…).
De leur côté, des clubs comme le Rotary, avaient également d'assez nombreux adeptes en Guinée, tant parmi les Européens que parmi les Libanais et les Guinéens “évolués”. Il ne faut pas non plus sous-estimer le rôle de la franc-maçonnerie 154 et de mouvements qui lui sont proches (telle la Ligue de l'Enseignement), qui influenceront de jeunes cadres guinéens, notamment des enseignants, dont plusieurs militeront également au PDG, comme Ray-Autra, Diallo Saïfoulaye, Keita Koumandian, etc. …
Parmi les fondateurs de l'Union des Malinkés (surtout préoccupée du sort des jeunes malinkés de Conakry), qui s'élargit en Union Mandingue en mars 1946, figurent [Ahmed] Sékou Touré, Sinkoun Kaba, Framoï Bérété (qui en deviendra le président). L'un de leurs premiers objectifs fut de tenter de faire élire un député malinké aux élections législatives françaises du 10 novembre 1946, mais sans succès. Un mois plus tard, le 15 décembre, Sékou sera même obligé de se désister en faveur d'un autre candidat, le Peul Barry Diawadou, lors des élections à l'Assemblée territoriale. Il resta membre de l'Union Mandingue pendant deux ans seulement, jusqu'à l'élection au Conseil de la République, au titre du deuxième collège, le 14 novembre 1948, d'un proche du gouverneur Roland Pré, Raphael Saller 155, qui bénéficia de l'appui de l'Union. Sékou démissionna peu après et fut le 7 février 1949 écarté du comité directeur à l'instigation de Framoï Bérété.
Mais depuis quelques mois déjà, l'Union refusait la “double appartenance” et avait expulsé le 15 avril 1948 les membres du RDA de son comité directeur ; l'Union se retirera du RDA lors de son Congrès de Kankan le 7 février 1949 156 et adhérera même à l'Entente Guinéenne fondée au mois de juin 1949, violemment anti-RDA et anti-PDG. Les autres groupements ethniques en feront d'ailleurs de même, sous la pression de l'administration coloniale, notamment à l'occasion des élections à l'Assemblée de l'Union française qui auront lieu en 1948 157.
Sékou écrira alors au sujet des associations ethniques “qu'elles avaient leur raison d'être en 1946, car à cette époque il n'existait ni en AOF ni en Guinée un seul groupement spécifiquement africain appelant à l'union des groupes ethniques et races. Mais au moment où un mouvement démocratique comme le RDA, qui à l'heure actuelle est le seul correspondant aux profondes aspirations de notre Afrique, tend à unir dans un front commun toutes les couches sociales sans distinction de races pour opposer leur grande force au colonialisme oppresseur, il n'est plus juste, plus tolérable, que des groupements racistes continuent à vivre.
En effet, l'heure des groupements racistes est révolue. Les hommes qui travaillent à leur maintien divisent les Africains, et par conséquent retardent leur évolution” 158.
Sékou Touré imputait également à ces groupements la perpétuation d'un sentiment de supériorité d'une ethnie sur les autres : “Les Malinkés créèrent l'Union du Mandé, et comme la capitale du grand empire du Mali se trouvait en Haute-Guinée, le Malinké se disait supérieur aux autres. Les Foulas aussi fondèrent leur parti, l'Amicale Gilbert Vieillard, et soutenaient qu'ils descendaient des blancs et, par conséquent, étaient supérieurs aux autres qui n'étaient que des “Ɓaleeɓe”, c'est-à-dire des nègres. Les Soussous, quant à eux, créèrent le “Comité de Basse Guinée”, et quel était leur motif de fierté ? Que les blancs étaient venus en premier lieu en Basse Côte, les autres sont donc des “Déifu”, c'est-à-dire des “barbares” ! Les Forestiers créaient eux aussi leur parti, dont tous les autres se moquaient : “Ce sont des sauvages, ils vivent dans la forêt !” 159
Quelques mois plus tard, en septembre 1949, Sékou intente un procès à Framoï Bérété, qui sera après 1956 son collègue à l'Assemblée territoriale de Guinée, alors président de l'Union du Mandé, pour avoir publié dans La Voix de la Guinée des articles le mettant en cause ; nous en reparlerons.
Paradoxalement, en septembre 1950, pour rassembler l'argent nécessaire à l'enregistrement des candidats RDA aux élections, Sékou crée le Groupement ethnique des originaires de Faranah !
Il est intéressant, notamment si l'on considère l'évolution ultérieure de certains pays africains — et parmi eux hélas la Côte-d'Ivoire — de noter ce que Sékou Touré écrira plus tard à propos des problemes ethniques sur le continent africain : “La meilleure forme de lutte contre l'exclusivisme ethnique ne doit pas consister dans la négation pure et simple des groupes ethniques qui existent actuellement ou en une quelconque forme de répression… C'est la conscience que les conditions de la survie et de la pleine croissance de chaque groupe ethnique vers un plus grand développement … (résident dans) la pleine croissance de la communaute nationale entière. Aucun groupe ethnique ne pourrait survivre si la nation périssait sous l'action dissolvante des particularismes ethniques.” 160

Notes
149. On appelait ainsi à l'époque les Africains qui avaient fait des études, qui étaient titulaires de certains diplômes ou de certaines décorations, qui étaient d'anciens officiers ou sousofficiers ou encore anciens combattants des deux guerres mondiales, qui bénéficiaient d'une pension, qui étaient des religieux ou qui enfin occupaient des postes dans l'administration.
150. Ces clivages ethniques sont très importants en Guinée et expliquent pour une part violences communautaires, méfiances traditionnelles, jeu des influences, mécanisme des alliances et répartition du pouvoir. Pour autant, il ne faut pas y voir la clé de tous les événements qui se sont déroulés (et se déroulent encore) en Guinée. A la tête de tous les partis (PDG, BAG, etc. …), il y avait des responsables originaires de toutes les régions guinéennes, même s'il y avait un peu plus de Malinkés au PDG et davantage de Peuls et de Soussous au BAG.
150n. [Note. En dépit de sa relative nuance, cette affirmation n'est pas corroborée par les faits. En réalité, le facteur ethnique est universel et omniprésent ; insistons-y, en Afrique et ailleurs. Ainsi, au Sénégal — que des auteurs et non des moindres, par exemple Ruth Morgenthau, considèrent comme ‘émancipé’ de l'ethnicité — la création du Bloc démocratique sénégalais (BDS) par Léopold S. Senghor et Mamadou Dia “attira dans la hiérarchie directe ou indirecte du parti, les leaders d'associations ethniques et régionales, telles que l'Union générale des Originaires de la Vallée du Fleuve, le Mouvement des Forces Démocratiques de la Casamance, et l'Association des Toucouleurs du Fouta-Toro pour la Défense de la Condition Humaine. (Thomas Hodgkin. African Political PartiesT.S. Bah]
151. Gilbert Vieillard, né en 1899 au Havre, commis aux services civils de l'AOF, diplômé de l'Ecole Coloniale et de l'Ecole des Langues orientales, est affecté en Guinée en 1935 comme administrateur en pays peul, d'abord à Dalaba, puis à Mamou. Sékou Touré écrit qu'il “était un administrateur colonial (nommé par le Front Populaire) considéré comme très humain par nos populations et qui (…) fit preuve de qualités morales exceptionnelles ; il s'était confondu avec les nôtres et parlait mieux le peul que plusieurs d'entre nous. Par reconnaissance envers ce Français, l'Association du Fouta prit son nom.” (in L'Afrique et la Révolution). Mobilisé en 1939, Gilbert Vieillard fut tué au front en 1940. Avant même la naissance de cette Amicale, les étudiants Peuls de l'École Normale William Ponty de Dakar avaient déjà fondé, pendant la guerre, La Voix du Montagnard, groupement culturel et d'entraide. Des congrès de l'Amicale eurent lieu en 1947, 1949 et 1953, année où elle déclarait 35 sections. En 1951, le député Yacine Diallo finança pendant quelque temps le journal Le Progrès Africain.
152. Elle avait été au départ une association pour la promotion des danses de la Forêt.
153. Cette association plus tard tentera vainement de s'opposer au mariage d'Andrée Kourouma, une jeune métisse catholique, avec Sékou Touré.
154. La Guinée fut fortement impregnée par la franc-maçonnerie, surtout après la première guerre mondiale et sous le long mandat du gouverneur Georges Poiret (1916-1930) ; son influence se fait sentir lors de la nomination d'administrateurs et de chefs de service, notamment dans l'enseignement, les finances, les travaux publics, les chemins de fer. Sékou Touré, qui vitupéra plus tard si fort contre la franc-maçonnerie en Afrique et en France (notamment dans son violent discours contre le Parti socialiste français et François Mitterrand en Juin 1977), de même que son demi-frère Ismaël, Keita Fodéba, Saïfoulaye Diallo, furent à certains moments très proches des milieux francs-maçons et liés d'amitié avec plusieurs dignitaires du Grand Orient de France. (voir note 278 …)
155. Ancien gouverneur de la France d'Outre-mer, membre du cabinet de René Pleven à Alger puis à Paris, premier directeur du Plan au ministère de la France d'Outre-mer (en 1945), élu sénateur de la Guinée en 1948 membre du groupe des Indépendants d'Outre-mer, Raphael Saller (1899-1977), martiniquais d'origine, est le frère aîné de Fernand Saller, chef de cabinet du gouverneur Roland Pré, dont il est aussi le beau-frère. Il ne sera pas réélu en 1955. Il sera ultérieurement — et jusqu'en 1965 — ministre de l'Économie, des Finances et du Plan de la Côte-d'Ivoire et avait Mohamed Tiécoura Diawara comme directeur de cabinet. Diawara lui succédera comme ministre du Plan et sera qualifié de “père du miracle ivoirien”. Mais il rend hommage à Raphael Saller dans ses entretiens avec Jean Florenzano, son collaborateur au Club de Dakar terminés avant sa mort le 13 juin 2004 sous le titre “Deux ou trois choses que je crois savoir…” et non publiés à ce jour : “Son rôle a été capital pour moi et bien sûr pour la Côte d'Ivoire qu'il a en quelque sorte mise sur les rails… La plupart des grands leaders africains (Modibo Keita, NKrumah, Sékou Touré et même, d'une façon disons plus démocrate-chrétienne, Senghor) étaient acquis aux solutions socialistes, plus ou moins collectivistes. Choisir la voie libérale, c'était aller a contre-courant. C'est l'intelligence d'Houphouët d'avoir partagé les choix de Saller en matière économique. … C'était un homme au pragmatisme brutal. Pour lui, seul le résultat comptait… Houphouet était en realité jaloux du rôle de Saller.” Pour le développement de la Guinée, on en vient à regretter qu'il ne soit pas resté sénateur en 1955, et qu'il n'ait pas mis au service de la Guinée indépendante les qualités dont a bénéficié la Côte d'Ivoire. Mais il est vrai qu'il ne s'entendait pas du tout avec Sékou Touré.
156. Il est symptomatique que le ministre de la France d'Outre-mer, Paul Coste-Floret, se trouve justement à Kankan pour y assister au congrès de l'Union mandingue, le jour même où celle-ci se retire du PDG-RDA et écarte Sékou Touré de ses instances dirigeantes.
157. L'Amicale Gilbert Vieillard se retire du RDA le 14 novembre 1948, l'Union Forestière en décembre 1949 ; l'Union de la Basse Guinée se divise, une majorité restant au RDA, une minorité, autour de Nabi Youla et de Karim Bangoura, fonde le 25 juin 1949 le “Comité de Rénovation de la Basse Guinée” violemment anti-RDA.
158. Ahmed Sékou Touré dans Le Réveil, organe du RDA, n° 368 du 13 juin 1949.
159. Ahmed Sékou Touré, RDA n° 92 , “La Révolution et la lutte des classes”.
160. Ahmed Sékou Touré, La lutte du Parti démocratique de Guinée pour l'émancipation africaine : Le pouvoir populaire, Tome XVI, Conakry, 1968, p. 10 (cité par Ladipo Adamolekun, Sékou Touré's Guinea, Londres, Methuen & Co, 1976, pp. 13-15)

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