webGuinée/Bibliothèque
Guinée Française
Géopolitique — Economie — Sociologie

Maurice Houis

Ancien Directeur de l'Institut Français d'Afrique Noire (IFAN) en Guinée

La Guinée Française

Editions Maritimes et Coloniales. 1953. 95 p.

Conclusion

La conclusion la plus générale qu'on puisse tirer de l'évolution de la Guinée Française est celle qui définit la Fédération elle-même : essor économique et industriel. Mais il serait faux de n'y voir que l'effet d'une solidarité. Non seulement la Guinée a forcé l'intérêt, suscité l'appui financier, appelé les investissements, mais elle a su convertir cette aide dans des réalisations importantes qui rejettent loin dans le passé son ancienne épithète de « belle endormie ». La Guinée s'est réveillée, au point de cristalliser autour d'elle les principaux efforts de l'A.O.F. en matière d'industrie et de rénovation économique.
Ses gisements de fer et de bauxite constituent les premières mines françaises au Sud du Sahara. Exploitables à ciel ouvert, proches des moyens de communication et des ports, elles ont une incidence heureuse sur la réorganisation du chemin de fer, la réfection définitive des routes et surtout l'extension du port de Konakry. Berceau du Niger, du Sénégal et des rivières côtières, réserve immense d'énergie hydro-électrique, la Guinée est dotée, de possibilités infinies d'industrialisation. Enfin, pays dont l'agriculture et l'industrie s'équilibrent, elle connaîtra bientôt une ère de mécanisation rationnelle où les barrages et l'électricité accroîtront son rendement agricole. Déjà première exportatrice de l'A.O. F. en produits fruitiers, elle prend une avance considérable dans la production des palmistes et est appelée à devenir le grenier à riz de la Fédération.
Malgré ce départ rapide, les heurts, du point de vue humain, si on sait les prévoir à temps, ne sont pas à craindre car, dans le cas de Konakry notamment, le développement affecte le plan technique de la grosse industrie et des équipements de base et ne se produit pas, comme à Abidjan, autour d'activités commerciales multiples et au prix de lourdes concentrations urbaines ; il est par avance organisé, concentré autour de plusieurs points. L'élargissement de la banlieue de Konakry résoud spontanément une partie des problèmes de l'habitat. Très suggestifs sont les exemples de la Compagnie Minière et de la Société Bauxites du Midi qui ont construit des cités pour leurs ouvriers et leurs familles. Si le Service des Domaines veut bien obéir à des principes sévères, exempts de facilités, et ne pas surcharger le cadastre de titres provisoires qui enfreignent la mise en valeur des terrains, si les plans d'urbanisme prévus sont rigoureusement respectés, la Guinée verra s'allumer d'années en années sur son territoire de nombreux centres urbains, non seulement autour de l'autostrade Konakry-Manéa mais partout où les hommes, dominant le sol et l'eau, sauront en tirer d'ingénieuses réalisations. L'esprit politique et social des Africains de Guinée, mieux assis que dans d'autres Territoires, plus nuancé, doté d'une base coutumière et d'un sens de la terre encore solide, leur sera une garantie et un concours sérieux dans leur évolution au sein de l'extraordinaire croissance de la Guinée Française.