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Presse écrite


Sékoutouréyah. Un baptême illégitime !

Le Lynx. N° 394 - 11 octobre 1999


On dit souvent que heureusement que l'oubli existe. Mais il y a des évènements qui constituent des composantes importantes de la mémoire collective des peuples et qui, lorsqu'ils sont douloureux, sont des repères avertisseurs qui crient: "Plus Jamais ça"!
Lorsque nous analysons les discours officiels du 3 avril 1984 à nos jours, nous remarquons que les aspects négatifs du règne du PDG ont tendance à s'estomper, malgré leur monstruosité et que l'histoire n'aurait tendance à retenir que le "NON" qui a conduit la Guinée à l'indépendance.
Sans chercher à polémiquer sur le mérite de Sékou Touré dans ce processus, il nous semble difficile d'occulter

qui ont ponctué les 26 années de dictature sanglante du PDG qui ont suivi.
Il est d'ailleurs, intéressant de rappeler que les communiqués qui ont justifié le coup d'Etat du 3 avril 1984 étaient justement fondés sur l'énumération de ces méfaits.

Le discours programme du 22 décembre 1985 campe de belle manière la situation: "Pour mesurer l'ampleur de la tâche qui nous attend, il faut comprendre comment fonctionne le système dont nous avons hérité".

Au départ un groupe d'hommes se rend maîtres du pays et des richesses de son sous-sol: l'or, les diamants et la bauxite pillés directement ou par compagnies minières interposées.
Alors que ces hommes vivent dans l'opulence, le pays est laissé à l'abandon. Les discours détournent la population des réalités. Durant 26 ans, la politique remplace la production. Les conséquences en sont dramatiques pour l'économie, pour les hommes et pour l'Etat. La monnaie, le syli, est à l'image de l'économie guinéenne, gravement malade, la santé d'une économie se mesure à la solidité de sa monnaie.
L'Etat, ou plutôt ce qui en tient lieu, est devenu le premier brigand de Guinée. A sa place, pour cacher le système, il y a le parti, le PDG.

Aujourd'hui le parti a disparu mais le système est toujours là. Il faut faire de profondes réformes. Mais cette fois-ci, Guinéens, vous ne vous sacrifierez pas pour le seul profit d'une poignée d'hommes (Sékou Touré et son entourage), vous êtes maintenant responsables de votre avenir. « A la fonction publique, nous avons hérité de la pagaille ».
Ce discours du 22 décembre 1985 a été lu par le chef de l'Etat qui a baptisé le nouveau palais Sékoutouréya. Le 27 août 1999, il qualifiait les 26 ans de règne de Sékou (en soussou) d'années douloureuses. Le 2 octobre 1999, c'est de son mérite qu'il parle.

Que faut il retenir? Face au discours d'aujourd'hui, il est légitime de se demander

Nous, enfants des disparus, n'oublions pas et n'oublierons jamais que Sékou Touré était avant tout un tyran. Des dizaines de milliers de personnes sont mortes au Camp Boiro, dont 71 fusillés le même jour, un 18 octobre 1971. Il serait juste que cette date soit commémorée comme le jour des martyrs guinéens, particulièrement par l'ORTG.
Devons-nous, nous attendre à ce que les noms de Siaka Touré, Ismaėl Touré soient également immortalisés?
Pour notre part, par fidélité à la mémoire de nos parents disparus et aussi par amour pour la justice, nous refusons de pardonner et encore moins d'oublier jusqu'à ce que Sékou Touré et son système soient condamnés officiellement. Et "Tant pis, pour nous les mécontents". L'histoire jugera.

Enfants feu Dr Alfa Taran assassiné par Sékou Touré


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