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Presse écrite
Assemblée Nationale
Trois nullités sur la sellette !
Le Lynx. N° 400 - 22 novembre 1999
L'Assemblée Nationale dominée par le PUP, parti au pouvoir, a épinglé la semaine dernière la SEEG (Société d'Exploitation des Eaux de Guinée), la Sogel (Société Guinéenne d'Electricité), et la Sotelgui (Société des Télécommunications de Guinée). Ces sociétés seraient mal gérées et pratiqueraient des prix fous. Ces trois entités s'occupent de secteurs névralgiques de la vie nationale : l'eau, le courant et les télécom. Pour tout Etat qui se respecte (comme la Guinée) ce sont les services de base qui couvrent les droits élémentaires du citoyen. Trois sociétés, trois échecs, trois catastrophes.
- La Sogel ce n'est pas seulement la mauvaise gestion. Elle est cannibalisée par ses propres employés. Un client régulièrement abonné et vivant dans un petit appartement de trois pièces. Il a tellement accumulé les dettes (1600 000 FG) qu'il ne peut plus régler ses factures. Comment un abonné qui n'a même pas un climatiseur peut-il avoir accumulé tant d'impayés? Avec la complicité des agents de la Sogel ! Vous devez 10 000 FG, vous payerez 2000 F à l'agent SOGEL chargé de votre secteur ou à celui qui est préposé à la coupure…D'autres font mieux. Lorsqu'ils sont parents (ou parlent la langue) du patron de la zone, ils n'ont même pas de compteur. C'est plus simple. Tout le monde sait que dans la commune de Kaloum, l'électricité est sous payée quand elle est payée. Nous connaissons une famille qui vit dans un appartement de trois pièces (sans compter les toilettes, la cuisine et la véranda) et qui dispose d'un climatiseur, d'un fer à repasser, d'un frigo, d'un congélateur et d'un système audio-visuel et qui ne paie chaque deux mois que 13 800 FG (le montant de la facture envoyée par la Sogel) ! Qui dit mieux?
- La Sotelgui. On lui expédie des chefs malaisiens qui ne parlent pas français. Il faut donc payer la charge d'un traducteur. La première génération d'appareils était venue d'Afrique du Sud. Complètement obsolètes. Si vous vous battez (littéralement) et réussissez à obtenir une ligne téléphonique, il faut "jeter cauris" pour savoir si vous avez une facture. De ce point de vue, on peut dire que les Malaisiens ont innové en refusant de distribuer les factures aux abonnés. Résultat? des coupures commerciales intempestives. Et lorsque vous êtes coupé quelle galère pour vous faire rétablir ! Si vous arrivez à décrocher votre facture, faites bien attention car vous risquez de payer pour des communications que vous n'avez pas consommées. De toutes façons, en matière de téléphone la Guinée est encore à la préhistoire. Avec ce que cela entraîne pour INTERNET. Et les opérateurs privés qui se sont lancés dans le domaine ne pratiquent pas des prix accessibles aux Guinéens. Leurs prestations c'est pour les Blancs ou les hauts fonctionnaires internationaux ou encore la nomenklatura administrative et politique guinéenne. Ou les quelques commerçants qui ont réussi à sortir la tête de l'eau. Les locaux de la Sotelgui sont mal entretenus: planchers et murs sales, plafonds souillés par les eaux qui s'infiltrent à travers les tôles. Quant aux cabines publiques nous pensons qu'elles sont inadaptées. Comme elles ne peuvent pas être surveillées, elles sont à la merci des vandales ou de la moindre manif. Il est, à notre avis, plus sûr de privilégier les cabines privées (télé-centres). Dans notre pays à démocratie naissante et à l'esprit civique inexistant, les biens publics sont en danger perpétuel.
- La SEEG, c'est la grosse déception. On avait cru qu'avec ses partenaires français et ivoiriens, ça allait marcher. Et ça a marché quelques temps. Mais depuis, c'est la catastrophe.Un exemple édifiant. Sur la rue Ma 529 ( Boussoura), un tuyau a pété il y a une dizaine de jours. Un geyser est sorti du goudron. Pour le grand plaisir de beaucoup de citoyens qui ont largement profité de cette source inespérée. A la faveur du passage d'agents releveurs de la consommation sur les compteurs, la SEEG a vu le geyser le lundi 15 novembre. Le surlendemain mercredi, nous nous sommes rendu au bureau de la SEEG de Dixinn (en face du Stade) pour signaler la panne. Avec beaucoup de difficultés on nous a écouté. L'équipe de dépannage n'est venue que le jeudi après-midi. Ils ont fait le boulot. Sans vérifier si c'est bien réparé. Résultat: l'eau ne coule plus du côté droit de la chaussée mais du côté gauche… Ainsi va la SEEG : l'eau qui se perd à cet endroit, ce n'est le souci de personne là-bas. Quant au bitume bousillé, on s'en fout ! Ça n'intéresse personne, ni du côté de la commune ni du côté de la ville de Conakry.
La bonne gouvernance, ce n'est pas pour maintenant. Il faut dire que les Guinéens n'aiment pas payer les factures. Ils aiment les belles et bonnes choses, mais n'aiment pas y mettre le prix. Parmi les mauvais payeurs, des hauts fonctionnaires, des ministres et…des députés !
Bah M. Lamine