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Presse écrite

Réquisitoires et plaidoiries

La Lance. N° 158 — 29 décembre 1999


Le procès des présumés auteurs de détournements de deniers publics portant sur la somme de 319 215 000 à l'ANAIM (Agence Nationale d'Aménagement des Infrastructures Minières) tire vers sa fin. Après plus d'une semaine d'audiences au Tribunal de Première Instance de Conakry, le passage des huit accusés :

a permis de savoir ce que chacun a fait dans cette opération.
Ainsi, le 24 décembre ils ont tous été déclarés coupables des faits qui leurs sont reprochés par le substitut du procureur, Saïkou Yaya Baldé et l'avocat de l'Etat et de l'ANAIM, Me Kabélé Camara.
Les avocats de la défense, maîtres Sampil et Fodé Soumah ont plaidé non coupables. C'est le 29 décembre que le juge chargé du dossier va départager les trois parties au cours des délibérations..
Signalons que lors des audiences du 20 décembre, les huit accusés ont tous défilé devant la barre.

Lors de leurs auditions, les douaniers de Kamsar ont tous reconnu avoir volé.
Abraham Haba reconnaît que sur 18 500 000 qu'il est allé prendre à la banque au nom de son chef, Morlaye Camara, il a reçu 7 millions, qu'il a d'ailleurs remboursés. Hassane Kourouma déclare avoir perçu 58 millions de GNF des mains de Almamy Sekou Touré, sur lesquels il aurait remboursés 26 500 000. Almamy Sékou Touré, à son tour, soutient n'avoir touché que 16 500 000, qu'il a restitués. Enfin, Morlaye Camara a affirmé avoir bénéficié de 47 261 000. Il a remboursé 17 millions.
Tous les chèques émis portaient le nom de M. Morlaye Camara. Quant à celui qui a signé le chèque au niveau de l'ANAIM de Kamsar, c'est le mystère.
Au vu de tout cela, le substitut du Procureur, Me Saïkou Yaya Baldé a fait un réquisitoire accablant. Il a déclaré que tout le monde parle de ce procès puisque c'est une première.

"Le Guinéen était habitué à voler l'argent du pays impunément. Il y a belle lurette qu'une telle affaire n'est pas venue devant le tribunal".

Les accusés ont joué chacun en ce qui le concerne un rôle dans la magouille qui a permis de sortir des caisses de l'Etat plus de 300 millions de francs. Me Saïkou Yaya demande au magistrat, Me Hassane Diallo, de condamner les accusés conformément aux dispositions des articles 179 et 183 du Code de procédure pénale relatifs au détournement de fonds. Ceux-ci encourent donc des peines allant de 5 à 10 ans d'emprisonnement. Pour le cas d'Elhadj Baldé, le substitut déclare qu'il ne peut se fonder sur les déclarations évasives de M. Fodé Sylla, même si les ordres de payement ont été signés par Elhadj. Il laisse donc le soin au tribunal de se prononcer. Pour les douaniers de Kamsar, le représentant du ministère public a soutenu qu'il ne peut rien dire en plus de ce que les accusés eux-mêmes ont reconnu. Il demande au tribunal de les retenir dans les liens de la prévention de détournement de deniers publics et de les condamner à une amende collective de 1 million de franc guinéen. Me Saïkou Yaya a aussi requis une peine de 10 ans de prison pour Almamy Seny Conté, l'employé de GTI en fuite avec des millions de francs. Enfin, pour Yaya Gassama, le substitut déclare que ce dernier doit être retenu comme étant le maillon essentiel de la mascarade.

Déjà, Me Kabélé, dans sa plaidoirie en tant que partie civile avait martelé que la culpabilité de Fodé Sylla, Yaya Gassama, Koly Kourouma est établie. Pour Elhadj Baldé, il a émis des doutes. Pour les douaniers, Me Kabélé affirme que le détournement crève les yeux. En conclusion, il demande à ce que le tribunal exige le remboursement intégral des sommes volées, ainsi que la confiscation de tous les biens obtenus avec l'argent et une condamnation solidaire de tous les accusés aux dommages et intérêts évalués à 150 millions de francs guinéens.

Enfin, les avocats de la défense, Me Dinah Sampil et Fodé Soumah ont plaidé non coupables des faits reprochés à leurs clients. Tout de même, Me Sampil a prié le tribunal d'appliquer pour les douaniers le dicton "une faute reconnue est à moitié pardonnée". Concernant Elhadj Baldé, le doute profitant à l'accusé, il a demandé la libération pure et simple de son client. Pour Fodé Sylla et Yaya Gassama, Me Sampil demande au juge de les condamner au remboursement du montant volé. Me Fodé Soumah, défendant Koly, a clamé que ce dernier n'a exécuté que les instructions.

"S'il y a un détournement, ce n'est pas mon client, mais celui qui lui a donné des ordres".

Pour Me Soumah, Koly Kourouma a été victime de l'influence néfaste de la part de son supérieur hiérarchique :
— Mon client est ici pour avoir signé des chèques. Or à Kamsar il y a M. Daouda Touré qui a signé le chèque des douaniers, il n'a pas été inquiété. Monsieur le président, qu'on ne fasse pas une justice à deux vitesses, je demande à ce que mon client soit libéré" conclut Me Soumah.
Le verdict est prévu pour le 29 décembre.

Azoka Bah


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