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Presse écrite


Grève des médecins

La Lance. N° 155 — 8 décembre 1999


Annoncée depuis 4 mois, la grève des médecins a été finalement déclenchée le 6 décembre, dans les formations sanitaires et hôpitaux de Conakry et de l'intérieur du pays. Un médecin rencontré au CHU de Donka confirme:

« Nous avons retenu la journée du 6 décembre. Peut-être que demain nous reprendrons le travail. Mais jusqu'à jeudi, si rien n'est fait, le mouvement va reprendre et ce sera une grève illimitée”.

Le directeur de cet hôpital se garde de tout commentaire car, dit-il, “je suis de l'administration ». Au CHU de Donka c'était le calme plat. En médecine générale, des malades étaient là, très inquiets, attendant leurs “docteurs”.
A l'hôpital Ignace-Deen, le premier que nous rencontrons confirme que le mouvement y est suivi. A la question de savoir qu'est-ce que vous revendiquez, sa réponse est toute autre : “je n'ai rien à vous dire. J'ai peur des journalistes. ce sont des espions…”
Décidément.
Au niveau du grand portail de l'hôpital, c'est un chauffeur qui est en mal avec un garde républicain qui lui demande de faire demi-tour. Raison? “Il a klaxonné sans savoir que nous sommes dans un hôpital. Des malades peuvent être doublement troublés, parce qu'aujourd'hui, ils n'ont pas leurs médecins”. On nous conseille d'aller rencontrer le syndicat. Où ? “C'est au fond”, a indiqué un autre médecin que nous avons entendu dire: “Ne paniquez pas ! A mon temps, il y a eu une grève plus grave que celle-là. Mais nous avons pu l'éteindre”. Nous avons pensé que lui au moins serait notre source d'information. Erreur ! Tout ce qu'il a pu nous confier c'est: “Allez-y rencontrer les syndicats, s'ils sont libres bien sûr parce que nous avons appris qu'ils sont arrêtés”. Effectivement là-bas, point de syndicats. Dans les couloirs, c'est une dame qui explique ses peines à un médecin :
— Docteur, je n'ai pas pu dormir cette nuit, il faut faire quelque chose pour moi.
— Désolé madame, je ne pourrai rien faire pour vous aujourd'hui.
Vraiment dommage ! Ce médecin de nous confier que les syndicats sont bel et bien arrêtés et qu'ils sont au commissariat de Mafanco. Cap sur Mafanco. Le policier que nous abordons n'est pas gentil:
— Je crois que vous trouverez ce que vous cherchez. Si vous demandez pour une seconde fois s'il y a des médecins incarcérés ici, vous les rejoindrez.
Pardon, mon commissaire. Au centre de santé de Ratoma, la situation est pire. Pas de médecins. Il est même difficile de voir un malade. Il paraît que dès que les parents des patients ont appris cette nouvelle, ils ont préféré les prendre pour des cliniques privées, chères soient-elles. “Un médecin se mettre en grève! c'est dire qu'il est capable même de tuer ceux qu'il est chargé de soigner s'il n'est pas satisfait”, estime le parent d'un patient.
Les médecins se plaindraient de leurs conditions de travail. “Qu'on nous permette de nous surformer après l'école de la santé”, indique un jeune médecin. Pour toutes autres précisions sur cette grève, nous avons joint le Ministre de la santé, M. Kandjoura Dramé. Il semble amer face à ce mouvement qu'il qualifie d'illégal.

Bamba Bakary Gamalo


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