L'Indépendant N° 151 — 29 novembre 1999
Le “missionnaire” du Chef de l'Etat, Hervé Vincent Bangoura, continue de rédiger des rapports. Le premier rapport de synthèse, adressé au Chef de l'Etat, avait déjà provoqué un grand remue-ménage. Quel sera l'impact de ce second document titré “Rapport de synthèse sur le détournement de un milliard zéro soixante trois millions de francs” ? Larges extraits…
« Plus que tout autre, pour garder le cap, un chef d'Etat doit connaître la force des vents, l'ampleur de la houle, la direction des courants, l'ardeur de l'équipage. L'information exacte à tout moment sur la position du navire est pour lui aussi essentiel que l'aiguille dont l'aimant indique toujours le nord. » a dit Lénine parlant des faits qui sont toujours “tétus” (…)
Excellence Monsieur le Président, le 12 juillet 1999, en me confiant le dossier de Friguia (…) vous me disiez citation :
« même si tu étais en poste à l'ambassade, je t'aurais fait venir pour te confier ce dossier » fin de citation. (…)
Et lorsque je me suis entretenu avec les deux éléments que vous avez alors mis à ma disposition et après que je me sois entretenu avec eux, j'ai compris que j'aurais alors à faire à des gens qui sont forts, qui ont de longs bras. Mais l'expérience m'ayant enseigné que l'histoire n'attend pas et appartient seulement à ceux qui se révèlent capables de la saisir au passage ; je me suis alors dit que je devais remplir ma mission. Après vous avoir donc déposé le premier jet du Rapport traitant du cas de : un milliard zéro soixante millions de francs qui a fait sortir de terre la profondeur de la saignée que certains cadres, auxquels vous avez donné votre confiance, ont fait de notre économie, je voudrais maintenant respectueusement attirer votre haute attention sur ce qui suit ci-dessous :
L'objet de la présente note n'est pas de faire ressortir quelques faiblesses techniques de la procédure de traitement des dépenses de l'Etat à l'aide des lettres d'engagements. En effet, la rupture avec l'orthodoxie financière et les violations flagrantes et permanentes des étapes classiques de traitement des dépenses publiques (engagements, liquidations, mandatements et ordonnancements) dans une première phase, le chavirement entre les procédures dans une deuxième phase, ont conduit à des “erreurs” et ont été la cause, pendant un moment non négligeable, d'un manque total de transparence dans la gestion de la chose publique.
Notre présent propos portera donc essentiellement sur les remarques ainsi que les interrogations que le profane que nous sommes pourrait se poser à la vue de certaine catégories de dépenses figurant dans la série des lettres d'engagement éditées depuis 1997 par le ministre de l'Economie et des Finances. Nous avons en effet observé la dépense autorisée à l'engagement dans sa nature, son évolution financière, son imputaiton budgétaire et nous avons noté dans un bref commentaire nos remarques et interogations.
Ainsi nous notons :
Des informations de dernière heure qui nous parviennent ont fait état de la radiation de la fonction publique des sieurs HABIB DIARRA, ex chef comptable à la Direction nationale des Eaux et Forêts, et SACKO TOURE pour avoir monté avec la Direction nationale des investissements publics d'un document intitulé “GESTION RESSOURCES RURALES” d'un montant de 105 mllions de francs guinéens et dans cette affaire la commission spéciale n'a pas cru devoir interpeller les cadres DNIP. Des mêmes informations de dernière heure, il ressort qu'un dossier monté par un certain SALIOU DIALLO, ex chef-comptable du projet PEV et « parrainé par l'inspection générale du ministère des Finances » serait actuellement en étude au niveau de l'actuel équipe du projet PEV/SSP/ME à laquelle équipe, l'inpection aurait « demandé de prendre ce document en charge et le valoir sur le crédit annuel du projet PEV/SSP/ME et le paiement du montant à Monsieur SALIOU DIALLO » Ce dossier nous précise-t-on serait « en étude pour la forme à l'inspection générale des finances où il a été affecté à un certain Monsieur NOURDINE BALDE pour étude » et ce serait « pour les services RENDUS — entendre Faux témoignage » que l'inspection générale du ministère des Finances aurait fait monter ce dossier par SALIOU DIALLO qui aurait mencé de revenir sur ses précédentes déclarations devant la commission Spéciale si RIEN n'était fait pour lui.
S'agissant de la radiation de Fonction publique d'un certain OYE ONIVOGUI du ministère de l'Agriculture, il est apparu que c'est parce que certains fonds provenant d'un dossier relatif au règlement à SOTELGUI d'un certain montant au titre des arriérés inscrits à la dette et qui dépasserait le MILLIARD de francs guinéens avaient transité dans ses comptes. OYE ONIVOGUI et le sieur SACKO TOURE auraient été radiés de la fonction publique mais pas de la Direction des Investissements publics.
Sociéte Générale de Surveillance (SGS)
Au niveau de cette société, c'est de la « disparition ou détournement » de huit cent (800) véhicules dont il faudrait, dit-on, « demander à monsieur le ministre de l'Economie et des Finances » . Il y a lieu aussi de demader au ministre de l'Economie et des Finances les circonstances dans lesquelles cette SGS a été admise en Guinée après qu'elle ait été chassée du Gabon.
Excellence Monsieur le Président,
Comme vous le constatez par la lecture de ce document, l'institution par le Ministère des Finances de la “Lettre d'Engagement” a été d'une manière on ne peut plus machiavélique pour sortir frauduleusement d'importantes sommes d'argent des caisses de l'ETAT dès lors que le trésor avait déjà fait sortir les fonds avant même qu'ils ne soient comptabilisés. Le détournement de un milliard zero soixante trois millions de francs par certains cadres du ministère de l'Economie et des Finances et du ministère des Mines, de la Géologie et de l'Environnement est très peu de chose par rapport à la saignée qu'une dangereuse mafia qui a pénétré toutes nos institutions politiques, économiques et administratives a porté à notre économie et nous n'en voudrons pour preuve que cet autre fait. Dans la nuit du 03 au 04 juin 1999, un pan du mur d'enceinte du stade de Coléah dans la commune de Matam s'était écroulé et des informations immédiatement recueillies concernant l'édification de ce mur d'enceinte ont permis de savoir qu'un certain DIAMET DIOP, soudeur de son état domicilié au quartier Boulbinet avait, dans le cadre de reconstruction du stade de Coléah bénéficié de trois lots suite à un appel d'offre et de GRE à GRE en lots se répartissant comme suit :
Des informations que nous recueillons en effet, il est apparu que si l'Entreprise de soudure de DIAMET DIOP était chargée de construire le mur d'enceinte, le cahier de charges était, lui détenu par une certaine société dénommée "ROSSMO" que l'on dit avoir réalisé le stade.
Toujours selon les informations en notre possession, il ressort que le nommé DIAMET DIOP aurait travaillé « en sous-traitance avec l'Administration et Contrôle des Grands Projets — ACGP — et avec les conseils de son ingénieur chargé de la cellule bâtiments. »
Il faut rappeler que le stade de Coléah devait abriter la Coupe d'Afrique des Nations (CAN 99) et construit dans la précipitation sans études préalables, la non-prévoyance des caniveaux d'évacuation des eaux devaient immanquablement faire céder le mur et c'est ce qui est arrivé (…) Il y a lieu d'ailleurs de signaler que le coût d'exécution de ce mur d'enceinte du stade de Coléah côté sud, d'une longueur de 74 mètres et d'une hauteur de 4 m a été de : 31 768 875 (trente un millions sept cent soixante huit mille huit cent soixante quinze) francs guinéens.
La situation que voici démontre à suffisance et très éloquemment le peu de conscience que certains cadres accordent à la chose publique comme ce Monsieur MORY KABA qui se trouve à la tête de l'Administration et Contrôle des grands Projets (ACGP) (…) il y a lieu de se pencher sur les différentes gabégies dont MORY KABA se serait rendu « comptable lors de la construction du stade de LABE et avec l'aide de certains autres complices. »
Il est en effet revenu que les travaux de rénovation du « stade de LABE concernaient entre autres le drainage de l'aire de jeu, l'aménagement de la piste d'athlétisme, le bétonnage de la cour, la construction de toitlettes extérieures et enfin l'équipement. » Le lot N°2 du projet aurait « été réalisé par l'entreprise TED/AFRIC pour un volume d'exécution physique de 40% contre 100% initialement prévu. Les 60% auraient été exécutés par ROSSMO, une entreprise RUSSE sous-traitance de TED/AFRIC et cela avec la bénédiction de l'administrateur général de l'ACGP — MORY KABA — pour un coût de 250 millions de francs guinéens contre 113 552 500 Fg initialement facturés par TED/AFRIC et exécuté pour un montant de 99 255 000 Fg dont 9 855 000 Fg pour les bordurettes de la piste d'athlétisme ; 32 300 500 Fg pour l'aménagement de la piste d'athlétisme et 86 613 000 Fg pour l'aire de jeu soit une différence de cent treize millions cinq cent cinquante deux mille cinq cent (113 552 500) Francs guinéens dont SEULS MORY KABA et SEKOU SANGARE, son ex-conseiller technique et actuel Directeur général d'Air Guinée, peuvent justifier la destination.
La construction des toilettes extérieures quant à elle a connu le pire sous la Direction de MORY KABA pour coût d'investissement de 45 000 000 francs guinéens contre 18 000 000 FG initialement prévu par TED/AFRIC soit un écart de 27 000 000 Fg. Nous tenons à préciser que l'entreprise TED/AFRIC avait en stock d'agrégats 17 chargements de sable soit 238 m3 pour un montant de 935 000 Fg, 12 chargements de gravier pour un montant de 540 000 Fg et 12 000 L d'eau dans le bassin de TED/AFRIC pour un montant de 220 000 Fg. Ces matériaux ont été utilisés sur ordre de MORY KABA pour la construction des toilettes extérieures. Elles ont été construites à l'aide de briques en terre stabilisée contre des briques à ciment initialement prévues par le cahier de charges. En définitivement le coût réel des travaux de construction de ces toilettes extérieures a été de 7 800 000 Fg contre 45 000 000 Fg, qui ont été effectivement décaissés par MORY KABA, soit un détournement de plus de 37 200 000 Fg au préjudice de l'ETAT. En ce qui concerne les travaux de bétonnage de la cour, le coût initialement prévu était de 6 700 000 Fg contre 23 000 000 Fg effectivement décaissé soit une différence de 16 300 000 Fg à justifier par MORY KABA et SEKOU SANGARE. Quant à l'équipement, le marché a été exécuté pour un montant de 45 000 000 Fg contre 89 000 000 Fg effectivement décaissés soit une différence de 44 000 000 Fg à justifier par MORY KABA et SEKOU SANGARE. Monsieur MORY KABA est auteur de détournement des fonds de l'entreprise TED/AFRIC et de l'ETAT GUINEEN de plus de 239 747 500 Fg, de 40 tonnes de ciment d'une valeur de 6 200 000 Fg. A tout ce qui précède, il faut ajouter que sur ordre de MORY KABA, M. Siba ONIPOGUI représentant de l'ACGP sur le chantier de LABE a fait virer le mercredi 10 juin 1997 de la BICIGUI de LABE pour la BICIGUI de CONAKRY les montants suivants :
Enfin une information de dernière minute non encore recoupée, laisse entendre que M. MORY KABA à cause de l'ampleur de ses détournements est sur le point de quitter le pays si des précautions n'étaient pas immédiatement prises pour l'en empêcher.
Et voilà quelques faits que des vérifications opérées autour du détournement de 1 063 000 000 FG ont fait apparaître au grand jour d'une part et d'autre part que la logique des auteurs de tels crimes économiques se résume à un SEUL objectif : METTRE LA GUINEE EN FAILLITE et ou le régime en place en cessation de paiement et c'est concients du mal qu'ils ont fait et font encore au pays que les auteurs de telle forfaitures ne pouvaient accepter que l'on procède à une contre-enquête, dans des dossiers traités par ceux-là qui sont par leur dévotion. (…)
La mission qui nous a été confiée consiste à rechercher la vérité, RIEN de plus et surtout RIEN de moins.
Excellence Monsieur le Président, si au départ les faits ci-dessus signalés n'apparaissent dans le dossier de 1 063 000 000 FG (un milliard zero soixante trois millions) de francs guinéens, il y a lieu de préciser qu'il constitue l'un des crimes que ceux-là qui ont aujourd'hui peur de les voir découverts (…) ont commis contre notre pays et c'est cela qui explique la situation critique que travers notre économie nationale et le lourd déficit budgétaire entraînant de gros découvert des comptes du trésor à la BCRG et dont le montant avoisinerait aujourd'hui les cent soixante dix (170) milliards de francs guinéens pour un découvert admissible de quatre vingt (80) milliards soit donc le double.
(…)
Il reste à éclairer l'affaire des trois milliards qui opposerait la société GETMA et l'administration des douanes et affaire qui pourra être clarifiée dès que vous en aurez donné l'ordre.
Avec l'espoir que nous avons aidé à la manifestation de la vérité, croyez, Excellence Monsieur le Président, à notre Haute considération. »
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