L'Express — AFP
14/10/2009
Addis Abeba — L'Union européenne, qualifiant de crime contre l'humanité la sanglante répression du 28 septembre à Conakry, a réclamé des poursuites contre la junte en Guinée et son chef le capitaine Moussa Dadis Camara, accroissant un peu plus les pressions sur son régime.
“Le leader du coup d'Etat doit rendre compte de ses actes devant un tribunal pour crime contre l'humanité”, a estimé mercredi le Commissaire européen en charge du développement et de l'aide humanitaire, Karel de Gucht, lors d'une conférence de presse au siège de l'Union Africaine (UA).
“La répression du 28 septembre a été d'une brutalité jamais vue. On est véritablement confronté à un crime contre l'humanité. Et il y a une idée de principe qui est que, partout, quand il se passe un crime contre l'humanité, ces crimes soient jugés”, a-t-il expliqué.
“La justice internationale doit aussi être universelle, sinon elle perd sa crédibilité”, a-t-il insisté lors de cette conférence de presse organisée à l'issue d'une réunion UA-UE à Addis Abeba sur les question de paix et de sécurité en Afrique.
La violente répression par l'armée d'une manifestation de l'opposition à Conakry le 28 septembre a soulevé l'indignation de la communauté internationale.
La junte affirme que 56 civils ont été tués et 934 personnes blessées tandis que l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'Homme estime que plus de 157 personnes ont été tuées et 1.200 blessées, dont de nombreuses femmes violées. Les Nations unies ont fait état de plus de 150 morts.
Les déclarations de M. de Gucht, brandissant notamment le spectre de la justice internationale, viennent accroître la pression sur le capitaine Camara, qui avait pris le pouvoir lors d'un coup d'Etat sans effusion de sang en décembre 2008, après la mort de Lansana Conté à la tête du pays depuis 1984.
L'UA a ainsi fixé au 17 octobre la date limite pour que le chef de la junte, comme tout autre membre de son régime, renonce à se présenter à la présidentielle prévue en janvier.
Le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l'UA a prévu de se réunir jeudi après-midi pour se prononcer sur cette question.
Dans le communiqué final de leur réunion, moins virulent que les déclarations du commissaire européen, l'UE et l'UA mettent en avant “leur profonde inquiétude concernant la détérioration de la situation des droits de l'Homme en Guinée, les arrestations arbitraires et les restrictions à la liberté d'expression”.
L'UA et l'UE ont également souligné que la légitimité des prochaines institutions dépendrait de “la stricte neutralité des autorités de transition dans le processus électoral”, autrement dit de l'impossibilité pour les membres de la junte de se présenter.
“Je ne vois pas pourquoi il y aurait opposition entre l'UA et l'UE sur ce sujet. Notre communiqué est la réflexion d'un consensus international”, a précisé le Commissaire du département Paix et sécurité de l'UA, Ramtane Lamamra, au cours de cette conférence de presse.
“Ce que nous voulons, c'est remettre sur les rails le processus de transition en Guinée”, a-t-il indiqué, rappelant que “dans les prochaines 48 heures, le CPS devra se prononcer” sur les sanctions, si les responsables de la junte ne se sont pas engagés par écrit à ne pas se présenter à la prochaine élection.
Mardi, le Groupe international de contact sur la Guinée (GIC-G) avait estimé que la junte au pouvoir en Guinée devrait démissionner et permettre la mise en place d'une autorité de transition.
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