Conakry (AFP) — mercredi 13 janvier 2010
Risques de guerre civile et de divisions de l'armée, menaces sur les prochaines élections: un éventuel retour en Guinée du chef de la junte, le capitaine , “en convalescence” au Burkina Faso, suscitait mercredi de nombreuses inquiétudes à Conakry.
“Le retour de Dadis Camara dans les conditions actuelles risque de provoquer une guerre civile en Guinée”, indique à l'AFP le responsable de la branche guinéenne de la Rencontre africaine pour la défense des droits de l'Homme (Raddho) Mamadi Kaba.
“Ses partisans vont tenter de prendre le pays en otage et faire ce que le président feu général Lansana Conté (1984-2008) avait fait durant les dernières années de sa vie”, avec un entourage tout-puissant profitant de la maladie du chef de l'Etat, ajoute-t-il.
“Il faut que les communautés africaine et internationale se mobilisent et prennent leur responsabilité pour empêcher Dadis de retourner en Guinée”, selon lui.
Le président intérimaire, le général Sékouba Konaté, avait soulevé beaucoup d'espoir dans un discours le 6 janvier en annonçant que le Premier ministre de la transition serait “issu de l'opposition” et “désigné par elle-même”.
Le retour du chef de la junte, gravement blessé à la tête le 3 décembre lors d'une tentative d'assassinat par son propre aide de camp, “risque de provoquer une +fissure+ dans l'armée”, estime Souleymane Diallo, journaliste et administrateur du groupe de presse privé Le Lynx - La Lance.
“Ca va compliquer la transition parce qu'on a tellement tiré sur la fibre ethnique que les divisions régionales se sont exacerbées et la Guinée forestière (région d'origine du chef de la junte) va exiger le maintien de Dadis Camara au pouvoir”, poursuit-il.
Pour le président de l'Organisation guinéenne de défense des droits de l'Homme (OGDH) Thierno Mâadjou Sow, il doit “rester à l'extérieur” pour qu'il puisse un jour être jugé par la justice internationale.
“Nous voulons qu'il reste à l'extérieur parce que c'est la meilleur chance pour qu'il puisse répondre de ce qu'on lui reproche”, insiste-t-il, en faisant référence au massacre de plus de 150 opposants, selon l'ONU, le 28 septembre dans un stade de Conakry.
“Aucune juridiction ici ne peut le juger et le pouvoir politique ne va pas le livrer à une juridiction internationale. Nous souhaitons qu'il ne rentre pas en Guinée et qu'il reste surtout dans un pays qui sera disposé à le juger ou à le livrer à la justice internationale”, conclut-il.
“Dadis Camara encore à nos portes, c'est impensable, s'emporte un administrateur de société, ça va nous rappeler le 28 septembre. Rien qu'en prononçant son nom, les Guinéens ont le dégoût”.
“Si la communauté internationale veut un nouveau bain de sang en Guinée, qu'elle autorise le chef de la junte à retourner en Guinée”, avertit un cadre de banque, sous couvert de l'anonymat.
Les partisans du capitaine-putschiste souhaitent officiellement son retour en Guinée, sans toutefois avancer de date.
“Je ne sais pas encore (quand il va rentrer en Guinée) parce qu'on n'a pas échangé après son arrivée à Ouagadougou mais le président Dadis rentrera quand il l'aura décidé”, affirme Moussa Keïta, ministre secrétaire permanent du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD, junte).
Fodé Cissé, président du Congrès panafricain des jeunes patriotes de Guinée (Cojep), une association pro-junte, va dans le même sens: “nous sommes ravis que notre président ait retrouvé la santé, nous voulons qu'il revienne incessamment dans son pays pour continuer à assumer ses hautes fonctions”.
“Nous allons lui réserver un accueil des plus chaleureux pour montrer à ses détracteurs qu'il est l'homme de la situation”, a-t-il conclu.
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