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Guinée : “La dictature militaire fait régner la terreur”


Le Monde
30 septembre 2009

Le Monde.fr a contacté deux habitants de Conakry qui ont été témoins des violences perpétrées par la junte militaire.

Le premier témoignage émane d'un Français vivant dans la capitale guinéenne.

“Conakry est une ville morte. On n'a pas encore entendu de coups de feu ce matin. La ville est déserte. Les magasins sont fermés, il n'y a pas un seul taxi qui roule et les gens sont cloîtrés chez eux. Nous avons vu venir ces violences depuis quelques semaines, mais la situation n'a empiré que le 28 septembre. La dictature militaire de Moussa Dadis Camara fait régner la terreur. Les militaires se baladent dans des camions, armés jusqu'aux dents. Ils n'hésitent pas à frapper les gens qu'ils rencontrent dans la rue, arbitrairement. C'est un véritable état de terreur. On peut se faire attaquer à tout instant par des militaires. Ils n'hésitent pas à violer, à tuer et à piller en toute impunité. Ils rentrent dans les maisons, ils brûlent tout et repartent comme si de rien n'était. L'armée est complétement incontrôlée. La situation devrait évoluer dans les jours qui viennent. Beaucoup de membres de l'opposition ont été blessés ou arrêtés dans le stade de Conakry. Je pense qu'ils ne vont pas tarder à remobiliser les foules contre la dictature. Mais l'opposition n'est pas armée face aux militaires qui tirent à balle réelle. Le bilan sera beaucoup plus lourd. Beaucoup de gens sont blessés et n'ont pas accès aux soins car l'hôpital est encerclé par la junte.”

Le deuxième témoignage est celui d'un employée d'une ONG occidentale qui a recentré sa mission sur le secours aux blessés.

“Aujourd'hui, il y a des militaires partout dans Conakry mais la situation est calme. Lundi et mardi, notre ONG a beaucoup travaillé. Nous avons ramassé les morts et des blessés pour les amener à l'hôpital. La junte a catégoriquement refusé l'accès au stade aux ONG depuis le 28 septembre. On ne sait pas ce qu'il s'y est passé. Combien de blessés et de morts. On a fait le tour de la banlieue. On a récupéré un jeune qui avait pris une balle perdue dans l'épaule depuis la veille. On l'a transporté à l'hôpital. On ne sait pas ce qu'il est devenu. On a vu les militaires agresser les gens. Un autre jeune marchait tranquillement. Les militaires sont venus, lui ont enlevé sa chemise et l'ont battu avec la crosse de leur fusil. Ils l'ont bastonné et malmené. Il était mal en point. C'était de manière totalement arbitraire. Je l'ai vu de mes propres yeux. Mais nous n'avons pas pu intervenir, au risque de notre vie.”