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De part et d'autre de la frontière franco-libérienne, c'est la
même race kpèlè (ou guerzé ou kpèse ou encore kpèsi autant de noms suivant les régions) que nous trouvons. C'est
aussi la même langue qui est parlée.
J'ai pu parler, me faire comprendre, et comprendre ce qu'on me
disait, et cela jusqu'à Monrovia inclusivement, tant à l'aller
qu'au retour. Je puis dire qu'il n'y a pas plus de, différences
entre le parler du Libéria et celui de Yomou qu'entre ce dernier
et celui de Gouèkè par exemple, et mon passage à Yomou m'a servi,
car c'est le parler des gens d'ici qui tient le milieu entre le
Nord et le Sud.
Il y a cependant des distinctions à faire entre ces diverses régions,
qui s'étendent sur une longueur de 171 km et plus.
Le canton de l'Ouna du cercle de Nzérékoré se prolongeait autrefois
jusqu'à Naama, et tous les gens de ce pays ont encore absolument
le même langage.
Le pays compris entre le village de Naama et Gbanga s'appelle
le Dyokoèlè, du nom de la rivière Dyo, ce qui veut dire à côté du Dyo. Mais
leur langage s'appelle Dyoghota wo, parler du Dyoghota. Or le
Dyoghota en question n'est autre qu'un tout petit canton du cercle
de Nzérékoré, à côté du Diani, au Sud du village de Koulè, sur
la route de Macenta-Nzérékoré. C'est de là qu'ils viennent, et
ils en ont gardé le langage. Plus au Sud, dans la région de Kakata,
les gens disaient en parlant de moi : « Il parle le dyoghota wo
». C'est donc que ce langage et le mien se ressemblaient.
Au Nord, dans le district de Zorzor, la partie avoisinant. le
Diani est guerzé, et les gens de cette région ont le même parler
que ceux d'ici. Les relations familiales et d'amitié ont par suite
continué malgré la frontière.
Par contre au Sud, de Bopolu à Kakata, de côté et d'autre du Saint-Paul
et jusqu'à White-Plains, où les Guerzé sont serrés dans une bande
de terrain de 50 à 60 km de large, la langue guerzé a davantage
subi l'influence des étrangers : Bassa, Vèï, Gola, Bele, Gbande.
C'est surtout dans cette région de Kakata-White-Plains-Bopolu,
qu'il y a des différences avec le langage des gens du Nord. N'ayant
aucune connaissance des langues avoisinantes, je n'ai pu voir
de quel côté, et dans quelle proportion, venaient ces changements;
et je ne puis donner ici que les variantes glanées ici ou là.
koèli ho | bicyclette |
|
ho koèli |
gbî pele | chemin, automobile |
|
pelé gbî |
nyanin | lune |
|
nalou |
pê | écrire |
|
pênyê |
monoun | riz |
|
molon |
kène | grand |
|
kète |
kpèlèmoun | guerzé |
|
kpèlènou |
po | dix |
|
pu |
teê | vérité |
|
teyâ |
tègan | arachide |
|
tèlan |
nenen | faute |
|
lénen |
ya li | c'est ça |
|
yani |
ba | sur |
|
ma |
toulo | pluie |
|
tounâ |
yè | à toi | deviendra | biyè |
e | tu |
|
ba |
kpelin | chaise |
|
siè de hie ou sie s'asseoir |
gbaha | grosse natte en lamelles de bans |
|
gbatala au Nord, banc en bans |
haga | natte en jonc |
|
pen dyen : chose bigarrée |
yele koulou | avion, litt. train d'air |
|
kon gelèn : barque qui vole, au Libéria il y a des hydravions |
ti kè | faire les champs |
|
ti kè : faire un travail quel qu'il soit |
tomoun | chef |
|
kalon |
woun ga mèlay | ma tête se fend |
|
woun ga dyoli : ma tête me pique |
yèkè | petit habit court |
|
yèkè : uniquement chemise |
hadyali | perdrix |
|
kokoè : perdrix, onomatopée |
kpogolo | poudre de riz pilé |
|
kwi kpogolo : farine à pain ; au Nord: kwi lébè |
kwigen | rencontre |
|
kwen : limite des chemins d'un village à un autre ; Nord : nyen |
kwea la | loin |
|
kwa ma |
gegen | cuvette | deviendra | pani |
nèbè | papier |
|
kolo |
ninê nyêy kow | pourghère |
|
bamou |
yele tega | papaye |
|
doholo |
bolo | mouchoirs |
|
lokpa |
gbolohè | patate |
|
kwigê |
bè ti | là-bas |
|
manan |
ya hvoulo | eau chaude |
|
yè fan |
mènañ | caoutchouc | deviendra | laba de rubber |
mobili | auto-camion |
|
moto |
lakoèfija | écoliers de école |
|
soukouga (de school) ; soja (de soldier) |
minision | de milicien est passé dans le guerzé du Nord, déformé en masson, ce qui désigne le garde-cercle |
Dans le Nord, pour parler des parties du corps ou des parents,
c'est n qui signifie mon ou ma, son ou sa, suivant le ton aigu pour la
première personne et grave pour la troisième, ce n influera sur la consonne initiale du mot désigné, et il en résultera
l'assimilation de cette consonne, si elle est assimilable.
Dans le Sud on prononcera ce pronom en entier, et il n'y aura
pas d'assimilation, du moins dans certains cas.
nye nyoho (ma mauvaise main); au Sud : ne (e muet) ye nyono
dyabolo (mon beau-frère); au Sud : ne habolo
dyabolo (son beau-frère) ; au Sud na habolo
J'ai aussi entendu : ne le ba gbè pour na ba gbè du Nord. Son nom est quoi ?
En dehors de cela, je n'ai pu constater de différences pour la
grammaire et particulièrement pour la syntaxe, que dans les verbes.
J'ai retrouvé ces formes de temps, avec changements dans les pronoms
ou les auxiliaires, que Westermann avait notés comme étant guerzé.
C'est vraiment du guerzé, mais parlé seulement dans la partie
comprise entre Kakata, Bensonville, White-Plains et Muhlenberg
d'une part, et Bopolu, Zawolota et Sanoye, d'autre part, la seule
partie que Westermann ait visitée, et encore je ne suis pas sûr
qu'il soit allé jusqu'à Sanoyé.
Exemples:
ga pay (il devient) : a pay
e wèli ka ma (ton amour est sur moi, je t'aime) : ga e wèli (litt. je t'aime)
ga bè (je suis ici) : ha ka bè
na pa (je suis venu) : na na pa
ga pay (je suis en train de venir) : ha ka pay
Comme on le voit, le verbe reste entier, ce ne sont que les pronoms ou les auxiliaires qui varient.
Quelques autres remarques
La postposition ba (sur, dessus) se dira toujours ma.
Hanoye tè bè ba : Hanoye tè bè ma : Hanoyé est plus grand
diè à eux se dira di ma.
Il est à noter que ces remarques s'appliquent aussi en grande
partie au pays konon, à l'Est du cercle de Nzérékoré, région avoisinant
la Côte d'Ivoire. Les Konon sont en effet une partie des Guerzé,
mais il y a certes plus de différences entre eux et les Guerzé
de la région de Nzérékoré, qu'entre ces derniers et les Libériens.
Faut-il voir là dans ces rapports de langue un confirmatur de ce que nous disait un District commissionner, celui de Gbanga, à savoir que les vrais Guerzé sont les Konon
et que tout le reste n'est qu'une déformation du konon ? N'est-ce
pas plutôt le contraire ?
Le remarquable serpent Kale enroulé sur une case de Hanoye (Libéria) (noir et ocre)
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